Le maire démocrate, Bill de Blasio, a annoncé qu’il se rangeait à l’avis d’un panel préconisant la fermeture de cet immense espace carcéral au milieu de l’East River, entre les districts du Bronx et du Queens, même si cette fermeture devrait prendre "au minimum 10 ans".
Rikers Island est une bande de terre d’un peu moins de 2 km2 située en face de l’aéroport de La Guardia, au milieu de l’East River. Seul lien avec l’extérieur, un pont dont l’accès est protégé par un poste de contrôle où il faut montrer patte blanche. C’est cet isolement idéal, tout en restant au cœur de la mégalopole new-yorkaise, qui a incité les autorités américaines, dans les années 1930, à construire ce qui est aujourd’hui le deuxième plus grand centre carcéral des Etats-Unis et la prison de la honte.
Il s’agit d’une véritable ville, qui ne compte pas moins de dix centres de détention, employant 7 000 gardiens et 1 500 civils qui ont la charge de 11 000 détenus. Malgré son gigantisme, ce complexe pénitentiaire avait tout pour rester à l’abri des regards.
"New York va fermer Rikers Island. Cela prendra plusieurs années, cela nécessitera des décisions difficiles mais cela va se faire", a déclaré M. de Blasio lors d’un point presse.
"Pendant longtemps, j’ai trouvé l’idée noble mais je ne voyais pas comment y arriver, vu les conditions auxquelles nous étions confrontés", a-t-il expliqué. "Il est apparu clairement qu’il fallait qu’on allonge les délais si on voulait être honnête, et que 10 ans était la durée minimum pour y arriver. Et c’est ça qui a été la percée".
Rikers Island est l’une des prisons les plus connues des Etats-Unis, avec Sing Sing (également dans l’Etat de New York), San Quentin en Californie ou encore ADX dans le Colorado, surnommée "l’Alcatraz des Rocheuses".
Sid Vicious, des Sex Pistols, ou le rappeur Tupac Shakur ont eut à dormir dans ses cellules. De même que l’ex-directeur du FMI, Dominique Strauss-Kahn, qui y fut brièvement incarcéré en mai 2011 après avoir été accusé de tentative de viol par une femme de chambre. Son avocat avait demandé son transfert, soulignant la mauvaise réputation du lieu.
"Depuis trop longtemps, Rikers Island se distingue comme un symbole d’injustice dans notre ville, comme une tâche sur notre système pénal", a déclaré Melissa Mark-Viverito, élue hispanique pour des quartiers du Bronx et de Harlem, qui plaide pour la fermeture de Rikers Island depuis des années.
"Ses violences endémiques, ses abus ternissent la réputation de la ville de New York depuis des décennies", a-t-elle ajouté.
Comme elle, de nombreux responsables new-yorkais et spécialistes en droit ou criminologie demandaient la fermeture du lieu, dénonçant sa vétusté – la première prison sur l’île remonte à 1935 – et les cas de violences quasi-quotidiens. En septembre encore, six surveillants avaient écopé de plusieurs années de prison pour l’agression d’un détenu.
Des conditions d’autant plus dures que quelque 80% des détenus de Rikers attendent leur procès et n’ont pas encore été condamnés.