Des universitaires font une lecture plurielle de l’ouvrage « Le Maroc face au printemps arabe » de Khalil Hachimi Idrissi

Quatre professeurs universitaires ont fait, mercredi à Rabat, une lecture plurielle de l’ouvrage « Le Maroc face au printemps arabe » du journaliste et écrivain Khalil Hachimi Idrissi.

Lors d’une conférence organisée à l’initiative du Centre des études et recherches en sciences sociales (CERSS), Mohamed Haddy, professeur à l’Institut national d’aménagement et d’urbanisme (INAU), Mohamed El Hachimi, professeur à l’Université Chouaib Doukkali d’El Jadida, Abdelhamid Benkhattab, professeur à l’université Mohammed V de Rabat, et Mohamed Benhalal, professeur à l’université de Taza, ont souligné que cet ouvrage donne une photographie circonstanciée et ponctuelle de la période allant du déclenchement du mouvement du 20 février jusqu’à la veille du référendum constitutionnel de juillet 2011.

"Parler de l’ouvrage c’est véritablement revivre le mouvement du 20 février dans quelque chose de très important, c’est-à-dire les causes qui ont fait que le mouvement s’est déroulé de manière que l’on connaît", a indiqué M. Haddy (INAU), notant que malgré les dysfonctions économiques ainsi qu’une stase politique et sociale, ce mouvement n’a pas eu le même impact en comparaison avec d’autres pays arabes, "balayés par la tornade".

"Ce qui est extraordinaire et qui devrait nous interpeller est que le pays est habitué au mouvement. C’est dans sa tradition, et ce bien avant l’arrivée du protectorat", a-t-il poursuivi, estimant que le mouvement du 20 février était "tout simplement la rue qui s’est réappropriée sa place", qui a voulu "redémocratiser" la démocratie, en exprimant ce que n’ont pas pu faire ni les forces politiques ni les forces socio-professionnelles et en réveillant le champ politique et en redonnant ainsi de l’espoir à ce pays.

Tout le monde avait peur que ce mouvement se traduise de la même manière qu’en Tunisie, qu’en Egypte ou ailleurs, or c’est mal connaître la singularité marocaine, a fait savoir le professeur Haddy, rappelant que les événements de Gdim Izik, dont a parlé l’auteur de l’ouvrage, sont également une expression de la rue, qui ont été instrumentalisés par la suite, de la même manière que le mouvement du 20 février.

"Est-ce pour autant qu’il faudrait occulter le conflit, le poids et le contrepoids ?", s’est-t-il interrogé, affirmant que c’est cette expression de la rue qui a permis au Maroc de faire un grand pas en avant.

Pour sa part, M. El Hachimi (Université Chouaib Doukkali d’El Jadida), a expliqué que cet ouvrage est un écrit produit en deux moments, le premier étant le moment où les textes ont vu le jour sous forme d’éditoriaux présentés comme une lecture événementielle de faits et le deuxième est le moment de les rassembler.

Selon cet universitaire, le deuxième moment a rencontré un obstacle lié au risque de dévier du sens initial que l’auteur aurait voulu donner à ces textes au moment de les écrire, jugeant que la logique lors de la préparation de l’ouvrage présidait à l’addition des textes et à leur mise en séquence, les dotant ainsi d’un deuxième sens.

"L’auteur a pu déceler, à travers ses textes, trois éléments considérés comme des signes avant-coureurs, le premier étant le rapport très problématique avec la notion de temps qui pèse sur la classe politique en général, le deuxième ce rapportant à quelques éléments d’une crise de médiation et le troisième ayant trait au retard enregistré au niveau d’un certain nombre de chantiers de réforme", a-t-il ajouté.

"A mon sens, l’un des points forts de ce livre est d’avoir montré que le fait de s’assigner énormément des objectifs pour se retrouver à chaque fois devant un bilan mitigé, signifie que la notion du temps stratégique est absente des chaînes intellectuelles de notre classe politique qui semble fatalement tentée de faire dans le court-termisme", a estimé M. El Hachimi.

Par ailleurs, M. Benhalal (université de Taza) a indiqué que "cet ouvrage, qui traduit la pensée de l’auteur et ses positions politiques et sociales, vient à point nommé pour relancer le débat sur un sujet qui est toujours d’actualité et jeter la lumière sur un événement qui a chamboulé la scène politique arabe".

"Ce texte constitue un document scientifique, voire même une source historique pour les chercheurs en sciences politiques et sociales, qui va enrichir la bibliothèque de l’histoire politique", a précisé M. Benhalal, notant que l’ouvrage contient également des messages forts aux acteurs sociaux et politiques, en enseignant sur la manière dont il faut agir face aux manifestations.

"Le livre de M. Khalil Hachimi Idrissi est un recueil de regards sur le processus qui s’était enclenché autour du mouvement du 20 février, et c’est fort intéressant de revenir sur des événements dont quelques sept années nous séparent" a indiqué, de son côté, le directeur du CERSS, Abdallah Saaf, dans une déclaration à la MAP, précisant qu’il y a actuellement plus de distance, de lucidité et d’objectivité à l’égard de ce mouvement.

Selon M. Saaf, l’intérêt de cette lecture est d’avoir plusieurs angles et plusieurs lecteurs avec des formations et des idées différentes, ce qui permet de jeter un regard plus juste et moins enchanté sur des événements qui nous avaient pourtant mobilisés au début de l’année 2011.

Paru aux Editions La croisée des chemins, "Le Maroc face au printemps arabe" est un ouvrage qui regroupe, sept années après le printemps arabe, les éditoriaux de M. Hachimi Idrissi, publiés dans "Aujourd’hui le Maroc" entre juillet 2009 et juin 2011. On y retrouve les réponses aux nombreux questionnements que l’on pourrait se poser quant à la genèse du Mouvement du 20 février, ses attentes, ses aspirations et ses résultats.

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