La dangereuse escalade entre l’Iran et l’Arabie saoudite
« L’Arabie saoudite paiera un prix élevé » avait lancé Téhéran en direction de Ryad après l’annonce de l’exécution du leader de la mouvance chiite saoudienne Nimr Baqer Al-Nimr en compagnie de 46 autres personnes accusées de terrorisme dont des fidèles du réseau Al Qaïda que dirigeait Oussama Ben Laden.
Par Mustapha Tossa
Les deux puissances s’affrontent déjà sur de nombreux théâtres. Le plus brûlant est le Yemen. L’Arabie tente de restaurer le pouvoir légitime d’un président, Mansour Hadi, contesté par des rebelles Houtis à l’obédience chiite et aux fidélités iraniennes. Le plus sanglant est le théâtre Syrien où les Saoudiens tentent depuis presque cinq années de démanteler le régime de Bachar al Assad alors que les Iraniens, aidés par les Russes, livrent un effort gigantesque pour lui tenir la tête hors du goulot. Le plus confus est le théâtre irakien où l’Arabie saoudite est accusée de soutenir les mouvements terroristes tandis que les Iraniens soutiennent de facto le régime sectaire de Baghdad. Enfin le théâtre le plus tendu et le plus ancien est le Liban où les Iraniens entretiennent un puissant groupe politico-militaire, le Hezbollah, tandis que les Saoudiens misent sur la mouvance sunnite incarné politiquement par Saad Hariri pour conserver le Liban dans sa sphère d’influence.
Depuis que la communauté internationale est parvenue à lier l’Iran par un accord sur la maîtrise de son nucléaire, l’Arabie saoudite avait vu rouge. Non seulement elle avait échoué à maintenir son concurrent iranien dans l’isolement international en diabolisant son image, mais elle avait immédiatement senti le danger à traiter avec une puissance iranienne débarrassée des sanctions internationales, reprenant tout sa place dans le grand échiquier des nations.
Cette exécution de Nimr, une icône de l’opposition chiite, a provoqué une série de réactions, des condamnations et de menaces du monde chiite. Cette avalanche d’avertissements a de quoi interpeller les chroniqueurs de cette compétition historique entre Ryad et Téhéran. Que peuvent encore faire les Iraniens pour mettre à exécution leurs menaces? La guerre ouverte et directe entre les deux pays étant pour le moment exclue pour des logiques de gouvernance internationale, les coups bas vont connaître une intense floraison qui aura forcément un impact sur les différentes crises régionales dans lesquelles s’opposent les deux pays.