Pérou: le leader indigène Alberto Pizango libéré
Le principal leader indigène du Pérou, Alberto Pizango, a été libéré hier 24 heures après son arrestation à son retour d’exil, signal fort d’une détente entre l’Etat et la minorité indienne d’Amazonie, un an après des violences qui ont fait 34 morts.
Mais il a été laissé en liberté conditionnelle, à la fois un signe et un gage de détente, avant un rassemblement indigène à risque prévu le 5 juin pour l’anniversaire du massacre de Bagua (nord) en juin 2009.
Une intervention de police sur un barrage routier tenu par des indiens d’Amazonie avait dérapé en heurts, faisant 34 morts, dont 24 policiers, et 200 blessés. La tragédie avait traumatisé le pays, qui se croyait à l’abri de ce genre de violences depuis les derniers feux des guérillas dans les années 90.
Elle avait entraîné la démission du Premier ministre Yehude Simon.
Pizango, indien Shawi originaire du Loreto (nord), avait joué un rôle clef dans les protestations indigènes en tant que chef du premier collectif d’indiens amazoniens, l’Aidesep, représentant près d’un demi-million de personnes, disséminées en 65 ethnies.
Quelques heures après sa libération, Pizango a déclaré à la presse être revenu au Pérou à la fois pour "prouver son innocence" et "contribuer à la réconciliation nationale entre Péruviens".
Selon son avocat Marco Barreto, il est revenu à la demande collective des "apus" (chefs coutumiers) indigènes.
Pizango s’est aussi dit déterminé à pousuivre une lutte "pas seulement pour les droits des peuples indigènes, mais pour la défense de la planète terre agressée (…) dans un Pérou interculturel et démocratique".
Les indiens réclamaient en 2009 l’abrogation de décrets-lois controversés sur l’exploitation des ressources d’Amazonie, qui furent finalement révoqués dans l’émotion qui suivit Bagua.
A l’audience de Pizango jeudi, une poignée de militants ont manifesté leur soutien, dont l’actrice germano-péruvienne Q’Orianka Kilcher ("Pocahontas" en 2006), militante des droits indigènes. Elle a demandé à l’Etat d’assumer ses responsabilités pour Bagua, exprimant sa "tristesse que les frères péruviens s’entretuent". Même si l’Etat et l’Aidesep continuent de se renvoyer la balle sur la responsabilité des violences, la tension a baissé d’un cran.