Après neuf mois et demi de détention en Iran, le chercheur français Roland Marchal est rentré samedi à Paris, en échange, selon Téhéran, de la libération par la France d’un ingénieur iranien menacé d’extradition aux États-Unis.
« Roland est rentré », a annoncé son comité de soutien dans un bref communiqué.
Samedi matin, Paris avait annoncé la libération du chercheur.
Comme Mme Adelkhah, sa compagne, M. Marchal avait été arrêté en juin 2019. Tous deux sont chercheurs au Centre de recherches internationales (CERI) de l’Institut d’études politiques (Sciences Po) de Paris.
Vendredi, jour du Nouvel An persan, l’Iran a annoncé un échange de détenus entre Paris et Téhéran. L’Elysée ne mentionne pas pour sa part d’échange de prisonniers.
Selon des images diffusées par la télévision d’État iranienne, M. Rohollahnejad est arrivé à Téhéran dans la nuit de vendredi à samedi où il a été accueilli par quelques personnes de sa famille.
« Dieu merci, ces jours sont enfin terminés », a déclaré M. Rohollahnejad à la télévision d’État.
Les États-Unis réclamaient l’extradition de M. Rohollahnejad, l’accusant d’avoir tenté de faire entrer en Iran du matériel technologique en violation des sanctions américaines contre Téhéran.
« Faire revenir Fariba »
Mme Adelkhah, spécialiste du chiisme âgée de 60 ans, et M. Marchal, africaniste de quatre ans son aîné, ont été accusés de « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale », un crime passible de deux à cinq ans de prison. La chercheuse est aussi poursuivie pour « propagande contre le système ».
A Paris, leur comité de soutien a toujours clamé leur innocence et réclamé leur libération, disant craindre pour leur vie en raison de leur état de santé.
Joint par l’AFP, Saïd Dehqan, avocat des deux chercheurs, a nié que M. Marchal eut bénéficié d’un allégement de peine, comme l’avait affirmé la veille l’Autorité judiciaire iranienne.
« On parle de réduction de peine lorsque la peine existe et que le verdict est définitif (mais) mon client n’a même pas eu de procès », a-t-il dit, ajoutant que « Mme Adelkhah (était) très heureuse de la libération de (son compagnon, dont le maintien en détention) était une source de pression supplémentaire pour elle. »
« Il nous faut continuer la lutte pour faire revenir au plus vite Fariba », clame de son côté le comité de soutien.
« Nous accueillons avec soulagement l’arrivée de Roland Marchal à Paris », mais « seule la moitié du chemin est parcourue », a rappelé à l’AFP Jean-François Bayart, professeur à l’IHEID (Institut de hautes études internationales et du développement) de Genève (Suisse) et membre de ce comité.
Leurs inquiétudes se sont renforcées en raison de la propagation accélérée du Covid-19 en Iran, un des pays les plus touchés au monde avec un bilan de 1.556 morts samedi. L’épidémie est particulièrement redoutée en milieu carcéral.
Fariba Adelkhah a été très affaiblie par une grève de la faim de 49 jours. Elle « continue de souffrir d’une maladie rénale, conséquence de (cette) grève de la faim », a indiqué Me Dehqan.
L’avocat avait indiqué il y a quelques semaines que M. Marchal, en isolement quasi complet, avait été très affecté « mentalement et physiquement ».
Plusieurs échanges
Au cours des derniers mois, l’Iran a procédé à plusieurs échanges de prisonniers avec des pays détenant des ressortissants iraniens condamnés, en attente de procès, ou menacés d’extradition vers les États-Unis.
Téhéran a aussi libéré plusieurs prisonniers emblématiques à l’occasion du Nouvel An persan, sur fond de coronavirus, alors que l’Iran, déjà exsangue en raison des sanctions américaines, est encore affaibli par la pandémie.
La France entretient des relations complexes avec l’Iran en raison de la crise du nucléaire iranien, Téhéran ayant commencé à se désengager de l’accord conclu en 2015 pour l’empêcher de se doter de la bombe atomique, après le retrait unilatéral des États-Unis de cet accord et la réintroduction de lourdes sanctions américaines qui plombent l’économie iranienne.
Paris, Londres et Berlin continuent de tendre la main à Téhéran, notamment via des envois de matériel de protection contre le Covid-19, quand le président américain Donald Trump a opté pour une stratégie de pression « maximale » sur l’Iran.