Dans les placards, des pâtes, du riz, des gâteaux et des céréales. Dans les tiroirs, des bons pour des livres et de la papeterie et pour acheter des vêtements à un euro dans une boutique solidaire.
Pudiques et discrets, la plupart des étudiants qui viennent ici ne se disent pas pauvres. "Pourtant, ils le sont plus que les autres", dit Simone Bernaert, une bénévole.
Des étudiants aux parcours variés, mais qui sont tous en situation de grande pauvreté. D’après une étude de l’Insee datant de 2009, le taux de pauvreté est de 22,5% chez les 18-24 ans contre 13,5% pour l’ensemble de la population.
"Cette précarité étudiante, elle est vraiment cachée, on est loin de la connaître", estime Simone Bernaert. D’après elle, si cette permanence était plus visible, elle serait "submergée" par les visiteurs.
"Pour nous, c’est vraiment la face émergée de l’iceberg", confirme Marc Castille, directeur des relations extérieures et institutionnelles du Secours populaire.
"On imagine bien que pour un jeune étudiant, venir frapper à la porte du Secours populaire, des Restos du coeur ou de l’Armée du salut, ce n’est quand même pas une démarche d’avenir, il faut vraiment être au bout du rouleau", ajoute-t-il.
Si elle n’est pas nouvelle, la précarité étudiante se banalise, disent les associations.
Face à l’afflux d’étudiants dans ses locaux, le Secours populaire a dû ouvrir des permanences d’accueil dédiées à Lille, Albi, Montpellier et Paris. L’association envisage aujourd’hui d’en ouvrir de nouvelles à Paris, Orléans et à La Réunion.
Une épicerie solidaire étudiante a par ailleurs ouvert en octobre sur un campus universitaire de Lyon.
LE LOGEMENT POSE PROBLEME
"Avant, les étudiants arrivaient à se débrouiller avec leur famille, entre amis, ils ne venaient jamais chez nous", dit Bernard Thibaud, secrétaire général du Secours catholique.
Aujourd’hui, environ 20% des 160.000 jeunes reçus par l’association caritative sont des étudiants. Or, 92% des personnes qu’elle accueille vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Parmi les symptômes de cette pauvreté accrue, la démutualisation de 5 à 10% d’étudiants au cours des quatre dernières années, selon une mutuelle étudiante et, fait jadis rarissime, de plus en plus d’étudiants atterrissent en centres d’hébergement, explique Alain Raoul, directeur général de la fondation de l’Armée du salut.
Le problème central est le logement, s’accordent à dire les militants associatifs. Seules 160.000 places sont disponibles en résidence universitaire pour 2,3 millions d’étudiants, dit Bernard Thibaud.
Pour beaucoup d’étudiants, le loyer représente 50% du budget. Un coût d’autant plus dur à assumer que même pour les boursiers il existe un "décalage" entre le montant de la bourse et le prix de la vie étudiante, ajoute Bernard Thibaut.
Face a cette situation, de nombreuses associations de terrain et syndicats demandent la mise en place d’une allocation de soutien à l’autonomie des étudiants et des jeunes. Beaucoup demandent également l’extension du revenu de solidarité active (RSA) aux étudiants.
"Aujourd’hui, l’ensemble des équilibres en termes financiers sont essentiellement orientés vers les familles", dit Bernard Thibaut. "Pour les jeunes qui sont sans soutien familial, il y a là une très grande difficulté".