La vente de « La Kasbah rouge de Marrakech » à Paris, un coup d’accélérateur au marché de l’art

L’exceptionnelle vente de "La Kasbah rouge de Marrakech" du peintre français Jacques Majorelle, adjugée jeudi soir à Paris pour le montant "record" de 1,1 million d’euros, pourrait donner un coup d’accélérateur "extraordinaire" au marché de l’art, en crise depuis près de deux ans, estime le commissaire priseur français Me François Tajan, en charge de la vente.

"Jamais une oeuvre de Majorelle n’a atteint ce montant. J’espère que cela donnera envie aux collectionneurs d’acheter", a-t-il confié à la MAP au lendemain de la mise aux enchères de cette toile emblématique de la Cité ocre, chez "Artcurial", maison de vente parisienne dont il est le co-fondateur.

Dans un contexte de crise, il reconnaît que cette vente dépasse de loin les attentes de son étude qui a estimé le tableau entre 600.000 et 800.000 euros, selon le prix du catalogue.

Or la "Kasbah rouge de Marrakech" a été vendue à "presque deux fois" le montant espéré, soit plus de 1,3 million euros, en tenant compte les changes (commission, taxes), s’est-il félicité.

Il faut dire que la maison a tout fait pour réussir cette vente, en faisant en sorte qu’elle soit un "moment fort" de son opération de mise aux enchères de tableaux orientalistes d’exception, axée autour de Majorelle (1886 -1962) et ses contemporains, dont l’oeuvre est fortement influencée par leur passage à Marrakech.

Ces tableaux uniques, dont sept autres toiles de Majorelle, avaient fait l’objet d’une exposition en avril dans la Cité ocre, "ce qui a donné une ampleur, une résonance autour de cet événement", a expliqué Me Tajan, convaincu que la publicité est l’un des principaux ingrédients de réussite d’une vente aux enchères, en plus du critère de la rareté et de la qualité de l’expertise.

"L’exposition était un élément de motivation, comme en témoigne d’ailleurs l’intérêt suscité à cette occasion auprès des collectionneurs marocains et arabes en général, mais aussi européens et américains", a-t-il ajouté.

Conforté par les échos favorables de cet événement, le commissaire priseur devait en principe aborder la vente de jeudi soir avec sérénité, n’empêche que dès l’annonce du tableau 14 (code de la "Kasbah rouge de Marrakech" sur le catalogue) "il y a le coeur qui va trop vite", reconnaît-il.

Du haut de sa tribune, Me Tajan a su garder en professionnel son sang froid pour arbitrer, marteau à la main, une surenchère qui s’annonçait rude dès le départ.

Les enchères, démarrées à 400.000 euros, montaient très vite, sous la houlette de sept collectionneurs, dont six par téléphone et un sur place, chacun déterminé à avoir le précieux tableau, peint en 1924 et exposé pour la première fois cette année à Marrakech.

L’audience retient sont souffle lorsque la surenchère franchit le seuil des 800.000 euros (prix maximum du catalogue), mais cela était loin de démotiver les collectionneurs. Finalement, le tableau sera adjugé à 1,1 million d’euros. Le commissaire priseur frappe le marteau en prononçant "Adjugé!". L’opération est validée.

S’agissant de l’identité de l’acquéreur, on ne saura pas plus que c’est un collectionneur américain. Confidentialité oblige.

Sur le catalogue de vente, "La Kasbah rouge de Marrakech" (1924) est présentée comme une pièce majeure dans l’oeuvre de Jacques Majorelle, représentant "l’aboutissement" de sa quête d’un nouveau style où "il inaugure la voie à la série des Kasbahs de l’Atlas qui le guideront ses nouvelles recherches picturales".

Ce tableau mythique, choisi pour illustrer en 1926 la couverture du guide touristique de Marrakech, a été conservé jusqu’ici chez la famille de l’artiste.

Au total, huit oeuvres de Majorelle ont été mises aux enchères jeudi soir, dont "l’un des plus beaux exemples" du travail de Majorelle concernant le portrait, "Fatima ou la méditation", une toile de grande taille illustrant sa technique des inclusions d’oxyde d’or et d’argent, vendu à 290.000 euros, ou encore sa série des "Kasbahs de l’Atlas", vendue à 29.000 euros.

Selon Me Tajan, il y a actuellement un marché "assez fort" sur Majorelle avec une clientèle internationale qui s’intéresse de plus en plus à ses oeuvres inspirées de la Cité ocre où il s’installe en 1919 et y acquiert un terrain qui allait devenir par la suite le jardin Majorelle.

Le jardin, ouvert au public dès 1947, regroupe l’une des plus importantes collections de plantes de son époque et abrite aujourd’hui la magnifique collection d’art Islamique de Pierre Bergé et Yves Saint Laurent, le célèbre couturier français qui a choisi ce cadre pour ultime demeure.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite