L’impossible coalition unique contre Daesh
Le marathon diplomatique de François Hollande qui l’avait vu passer en quelques heures de Washington à Moscou avec des rencontres jugées cruciales avec le Britannique David Cameron et la chancelière allemande Angela Merkel a été un grand coup d’épée dans l’eau. L’échec est calculé en fonction des attentes suscitées au lendemain des terribles attentats qui ont frappé Paris. L’émotion fut dense et la détermination d’éradiquer Daesh fut grande. De nombreuses voix avaient souligné avec emphase que le temps était venu de former une seule coalition pour casser cette organisation terroriste, au lieu de deux qui se gênent aux entournures, l’une pilotée par les Américains, l’autre animée par les Russes. La première s’efforce de sortir Bachar El Assad du cadre du pouvoir à Damas. La seconde essaie à tout prix de l’y maintenir. Les deux logiques s’affrontent qu’elles produisent la paralysie de toute dynamique de changement.
Par Mustapha Tossa
Devant cette difficulté à rapprocher les points de vue, Moscou et Washington ayant des agendas antagonistes, François Hollande, seul dans sa détermination, dut se contenter d’une coordination des efforts internationaux pour lutter contre Daesh. Il est vrai que la France a intensifié ses frappes et mobilisé son arsenal maritime et aérien pour exercer une pression sur Daesh, mais il est clair aussi que cette paralyse des principaux acteurs internationaux est de nature à favoriser le statu quo pour Daesh qui peut continuer à s’implanter tranquillement sur les territoires et dans les esprits. Si on rajoute à cela, le jeu trouble attribué à la Turquie, la tâche paraît à la fois immense te presque impossible. D’ailleurs ce qui complique d’avantage le rapport à la Turquie sont les accusations russes directement adressées au Président Tayyeb Erdogan et à son entourage d’être les principaux bénéficiaires du trafic du pétrole organisé au profit de la puissance financière de Daesh. Erdogan est aussi un homme sur qui compte l’union Européenne pour stabiliser les deux millions de réfugiés qui menacent de marcher sur l’Europe et de faire en sorte de cautériser l’hémorragie.
La déception française a dû être si vive que le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius annonce pour la première fois que les forces du régime Syrien, hier encore honni par ses barbaries, peuvent participer à la guerre contre Daesh. Un tournant qui vise autant à faire l’économie de déployer des forces occidentales au sol qu’à indiquer l’épaisseur des couleuvres avalées par le diplomatie française pour mobiliser ce qui est mobilisable dans cette guerre contre Daesh. L’impossibilité manifeste de former une collation unique pour éradiquer cette organisation terroriste est le facteur principal de sa survie et de son expansion.
Pour François Hollande, il ne s’agit pourtant pas d’un échec total. Son activisme diplomatique s’est relativement avéré payant. Les Britanniques qui avait déjà refusé à David Cameron l’engagement de leurs forces contre Daesh en Syrie, viennent d’opérer un spectaculaire volte face et ont autorisé l’aviation britannique à entrer en action contre les bastions de l’Etat Islamique en Syrie. Les allemands, par solidarité avec la France, s’apprêtent à dépasser leurs réticences et blocages internes pour suivre l’action française. L’Europe est en train de se mobiliser pour augmenter l’épaisseur du tapis de bombes destinés à frapper la colonne vertébrale de Daesh.
Même si l’Europe semble se mobiliser sur le plan militaire, la guerre contre Daesh donne cette vague impression de prendre du plomb dans l’aile, que le souffle issu des attentats est en train de retomber. L’hypothèse de déployer des forces terrestres a été officiellement refusée par l’ensemble de protagonistes. Mêmes les différentes rencontres organisées sur le sujet en marge de la Cop 21 à Paris ne semblent provoquer le grand tournant attendu. L’argument évoqué pour ne pas déployer des forces terrestres est de ne pas s’embourber les pieds dans des régions aussi complexes et des conflits aussi insolubles. Les expériences afghanes et irakiennes fonctionnent comme des repoussoirs et des épouvantails susceptibles de castrer toutes les audaces guerrières.
Dans sa dernière sortie sur le sujet, Laurent Fabius a ouvertement lorgné sur la possibilité de sous-traiter les guerres terrestres aux Arabes. cette approche avait fait couler beaucoup d’encre sans qu’il ne soit possible de vérifier auprès des acteurs régionaux arabes leurs disponibilités à répondre favorablement à de telles requêtes. Ce qui a le don de plonger la guerre contre Daesh dans des horizons encore plus obscurs. Certains signes comme le déploiement des forces spéciales américaines sur le sol peuvent indiquer un tournant dans la guerre contre l’EI mais au jour d’aujourd’hui seul le bombardement aérien semble être l’unique stratégique pour affaiblir une menace aussi vitale que celle de Daesh.