L’Egypte se prépare à la « marche du million » de l’opposition

Suivant l’appel à la grève générale lancé dimanche, le mouvement de contestation a appelé à une "marche d’un million" de personnes mardi au Caire et dans tout le pays, pour accentuer davantage la pression sur le régime.

Cet appel a également été lancé dans la ville d’Alexandrie, dans le nord de l’Egypte, alors que le trafic ferroviaire a été suspendu dans tout le pays, empêchant les mouvements massifs de convergence vers la capitale. Internet restant largement bloqué, et les télévisions officielles d’Egypte ne diffusant pas les messages de l’opposition, les manifestants comptent principalement sur le bouche-à-oreille pour mobiliser une population prise entre espoirs de changements et craintes de l’insécurité après les scènes de pillages qui ont émaillé les nuits des principales villes.

Les responsables de l’opposition réunis lundi ont appelé à une marche d’un million de personnes depuis la place Tahrir (Libération, NDLR) du Caire, pour contraindre le "raïs" à quitter le pouvoir d’ici vendredi. Mais ils n’ont pas réussi à s’entendre sur une plate-forme commune de revendications, a déclaré Abu’l-Ela Madi, porte-parole d’al-Wasat, une fraction dissidente et modérée des Frères musulmans.

Ils sont convenus de se rencontrer à nouveau mardi au siège du Wafd, plus ancien parti de l’opposition légale, avant de se rendre place Tahrir pour manifester, a précisé Abu’l-Ela Madi. Les participants à cette nouvelle réunion devraient également débattre de l’éventuelle désignation du prix Nobel de la Paix et ancien patron de l’AIEA (Agence internationale à l’énergie atomique) Mohamed ElBaradeï à la tête de cette coalition naissante, au sein de laquelle les Frères musulmans refusent, eux, d’assumer un rô le moteur.

Selon Rashad al-Bayoumi, numéro deux du mouvement islamiste, la plate-forme unitaire pourrait exiger, outre le départ de Moubarak, la libération des prisonniers politiques, la mise en place d’un gouvernement transitoire jusqu’à l’organisation d’élections libres et équitables, et l’arrestation des responsables de la mort de manifestants. Le dernier bilan officiel fait toujours état de 97 tués.

L’armée a mis en garde lundi contre tout acte de nature à "déstabiliser la sécurité du pays" dans un message diffusé à la télévision qui apparaît comme une réponse à l’appel de l’opposition. Elle a toutefois assuré qu’elle n’"utiliserait pas la force" contre le peuple.

Pressé de toutes parts de lâcher du lest, Moubarak a, lui, nommé un nouveau gouvernement, en remplacement de celui dissous samedi. Principal élément marquant de cette nouvelle équipe, la nomination au poste de ministre de l’Intérieur de l’ancien général de la police Mahmoud Wagdi, à la place de Habib el-Adly, honni par la population pour la répression sanglante de la révolte populaire.

Moubarak a maintenu à leur poste les ministres de la Défense Hussein Tantawi, également promu vice-Premier ministre, et son collègue des Affaires étrangères Ahmed Aboul Gheit. Il a également choisi pour certains portefeuilles des personnalités respectées, comme le professeur Gaber Asfour, nouveau ministre de la Culture, qui remplace l’inamovible Farouq Hosni, en poste depuis plus de 25 ans. Le patron des antiquités égyptiennes Zahi Hawass est de son cô té nommé ministre des Antiquités, fonction nouvellement créée.

L’annonce de ce nouveau gouvernement a été accueillie par les protestations des milliers de manifestants rassemblés sur la place Tahrir, dans le centre du Caire, où se concentre le mouvement de contestation, pour la septième journée consécutive.

"Nous ne voulons pas que la vie reprenne son cours normal tant que Moubarak ne sera pas parti", a déclaré Israa Abdel-Fattah, un des fondateurs du Groupe du 6 avril, un mouvement étudiant pro-démocratique.

Malgré la forte présence militaire aux alentours, l’atmosphère était presque festive place Tahrir, alors que l’Egypte a vécu lundi une nouvelle journée au ralenti. Les banques, les écoles et la bourse du Caire étaient fermées pour la deuxième journée consécutive et l’Internet, coupé depuis vendredi matin, était toujours inaccessible. Les trains ont par ailleurs cessé de circuler, signe pour certains que le gouvernement cherche à empêcher les habitants des provinces de venir manifester dans la capitale.

L’aéroport international du Caire était également le théâtre de scènes de chaos, des milliers d’étrangers tentant de quitter le pays. Devant les boulangeries, les longues files d’attente s’étiraient sur les trottoirs.

Si les actes de pillage et de vols à main armée qui s’étaient multipliés vendredi soir et samedi ont semblé diminuer, quelques incidents ont néanmoins encore été signalés. Des soldats ont ainsi arrêté une cinquantaine d’hommes qui tentaient d’entrer dans le Musée national égyptien, au Caire, pour y dérober certains des trésors archéologiques du pays.

(Source AP)

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