« Gilets jaunes »: Macron jongle entre mécano des aides et « grand débat »

Outre le mécano compliqué des aides destinées à apaiser la colère des « gilets jaunes », et maintenant des policiers, Emmanuel Macron veut lancer au plus vite le « grand débat national » qui doit fournir une issue politique à la crise, en réunissant mardi soir à l’Elysée une bonne partie de son gouvernement.

Depuis l’annonce le 10 décembre par le chef de l’Etat de mesures sur le Smic, les heures supplémentaires et la CSG, qui n’ont pas convaincu des "gilets jaunes" moins nombreux mais encore très déterminés, l’exécutif continuait mardi à préciser les détails de ces gestes tout en annonçant l’abandon d’autres aides.

Edouard Philippe a précisé lundi que la prime d’activité ne bénéficiera finalement qu’à une partie des Smicards. Et Matignon a annoncé mardi que plusieurs aides annoncées en novembre seraient abandonnées: l’extension du chèque énergie à deux millions de foyers supplémentaires, le relèvement du barème kilométrique et le doublement de la prime à la conversion pour les gros rouleurs. Economie budgétaire : 130 millions d’euros.

Renoncer à des mesures est "une VRAIE ERREUR. Et inaudible et incompréhensible dans la situation actuelle", a vivement regretté sur Twitter le député LREM Matthieu Orphelin.

Les policiers, épuisés par le conflit, ont, eux, durci le ton pour réclamer des compensations, le syndicat Alliance appelant à "fermer les commissariats".

Pour calmer cette colère, le gouvernement a proposé mardi une prime de 300 euros. Elle devrait bénéficier à 111.000 fonctionnaires pour un coût total d’environ 33 millions d’euros.

Mardi après-midi, le chef de l’Etat continuait à faire appel au secteur privé pour donner un coup de pouce au pouvoir d’achat, en réunissant une vingtaine de grands groupes d’assurances et de mutuelles. Ces dernières ont accepté de modérer leurs tarifs, tout comme les banques la semaine dernière.

Péripétie dans ces marchandages, le groupe Vinci a renoncé à réclamer les paiements aux automobilistes qui ont passé gratuitement les péages bloqués par les "gilets jaunes", après les critiques du porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux.

En chute libre dans les sondages, Emmanuel Macron cherche parallèlement à mettre sur le rail la grande concertation nationale qui doit servir d’exutoire à la colère des manifestants et fournir une issue politique à la crise.

Il a décidé de convier son Premier ministre et douze ministres pour plancher sur ce projet et annulé son déplacement à Biarritz, destiné à préparer le G7, dépêchant pour le remplacer son ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.

Ce qui n’a pas découragé 200 "gilets jaunes" de tenter un coup de force pour perturber la réunion à Biarritz. La police les a repoussés à coups de lacrymogènes et balles de défense.

Contrairement à ce qu’avait annoncé Benjamin Griveaux, Chantal Jouanno, la présidente de la Commission du débat public (CNDP), autorité indépendante chargée d’organiser ce "grand débat", ne participera pas à la réunion à l’Elysée, a indiqué la présidence.

La CNDP s’inquiète déjà que ce "grand débat" n’apparaisse comme piloté par le gouvernement et se transforme en "meetings politiques" pro-Macron. Elle en a averti Edouard Philippe dans une lettre révélée par franceinfo et dont la CNDP a confirmé l’existence.

"J’en ai ras-le-bol de cette suspicion généralisée", a répliqué le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux. Si on voulait cornaquer le débat, le corseter, ça se ferait en préfecture avec le préfet en maître de cérémonie".

Les contours de cette concertation de trois mois, qui doit démarrer dans les jours prochains dans les mairies, restent encore très flous, tant sur son organisation que sur sa finalité. Chantal Jouanno, qui a multiplié les consultations ces derniers jours y compris avec des représentants des "gilets jaunes", devrait en annoncer les modalités jeudi.

Le débat devrait aborder quatre grands thèmes (transition écologique, fiscalité, organisation de l’État, et démocratie et citoyenneté, dont l’immigration). Il pourrait aussi porter sur le référendum d’initiative citoyenne (RIC), réclamé par les "gilets jaunes" et soutenu par l’opposition, de la France Insoumise à LR.

Mardi, les députés LREM ont promis leur "apport bénévole et enthousiaste" et présenté leur "groupe de pilotage" en vue du grand débat national, avec 13 référents régionaux et 5 référents thématiques, pour que "chacune des idées des Français soit remontée".

Les mesures du président Macron annoncées le 10 décembre seront présentées mercredi en Conseil des ministres, avant de passer à l’Assemblée jeudi et au Sénat vendredi. Avec l’objectif qu’elles puissent être applicables au 1er janvier.

Sur le terrain, le ministre de l’Intérieur a réclamé la fin de l’occupation des ronds-points et envoyé les forces de l’ordre déloger des manifestants.

Mais une partie d’entre eux reste très décidés, ciblant notamment les péages. Celui de Bandol (Var) a été incendié dans la nuit de lundi à mardi et dix-sept personnes ont été interpellées.

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