David Drugeon, Français sur la voie du jihad, donné pour mort en Syrie

Des stades de football au jihad international, David Drugeon, un jeune Français de 24 ans, tué mercredi par un tir de drone en Syrie selon le Pentagone, s’est converti adolescent à l’islam avant d’intégrer au fil des ans des groupes de plus en plus radicaux.

Né en 1989 dans l’ouest de la France, au sein d’une famille de classe moyenne sans histoire, il se passionne pour le football. Quand ses parents divorcent, en 2002, David Drugeon et son frère Cyril se rapprochent de musulmans salafistes, adeptes de l’islam des origines, qui se réunissent dans leur quartier.

Selon son père, Patrice Drugeon, David s’est converti très jeune à l’islam. "13 ans, vous imaginez? On était en divorce avec sa maman, mais j’avais de bonnes relations avec David et son frère aussi, il n’y avait pas de problème. Je l’ai vu se convertir, mais il était modéré".

"Il a été baptisé, il avait reçu une éducation européenne, avec des parents qui ont la foi chrétienne, et… la dérive", a poursuivi le père, interrogé jeudi soir sur la chaîne de télévision France 2.

Au contact des salafistes, David devient "Daoud", s’initie à l’arabe, apprend le Coran. Sur sa page du site internet "Copains d’avant", encore active, il pose en vêtement blanc, l’air sombre. Sur la liste des "pays où je rêve d’aller", il a noté : "Afghanistan, Algérie, Arabie Saoudite, Ethiopie, Irak, Israël, Maroc, Pakistan, Somalie, Soudan, Syrie".

"C’était un gars tout gentil, sans histoire. Un passionné de foot", confie à l’AFP, sous couvert de l’anonymat, une ancienne camarade de classe. Une mère de famille dont la fille était en classe avec lui ajoute: "C’était un gentil garçon, le papa était chauffeur de bus. Le petit travaillait très bien. On ne comprend pas ce qui a pu se passer dans sa tête".

Après avoir travaillé et économisé de l’argent, il part pour l’Egypte, fait des stages dans des écoles religieuses où il approfondit sa connaissance du Coran et de l’arabe, puis revient chez ses parents. Début 2010, il annonce à sa famille qu’il retourne en Egypte mais il prend en fait, comme bien d’autres volontaires internationaux, la voie du jihad, à destination des zones tribales pakistanaises.

Il y rencontre un Belge d’origine tunisienne, Moez Garsallaoui, vétéran de la "guerre sainte", considéré comme un membre important d’Al-Qaïda en Europe puis dans la zone pakistano-afghane. A son contact, "Daoud" se forme au maniement des explosifs, à la fabrication de bombes.

– "Artificier d’assez bon niveau" –

"Il est ainsi devenu un artificier d’assez bon niveau", assure à l’AFP une source sécuritaire, sous anonymat.

En revanche, ajoute un haut responsable français, "ce n’est ni un ancien militaire ni un ancien des services intérieurs ou extérieurs. Il est bien connu de nos services et des services américains, c’est un type relativement important dans son organisation, avec certaines connaissances techniques. Mais ce n’est pas dans l’armée française qu’on apprend à manipuler des bombes".

Quand la Syrie devient à son tour "terre de jihad", David Drugeon, comme de nombreux cadres intermédiaires d’Al-Qaïda lassés de vivre en permanence sous la menace des drones américains et de leurs missiles, quitte la zone pakistano-afghane et s’installe au sein des maquis islamistes, dans la région d’Idlib.

C’est là, au sein d’un convoi de 4×4 pris pour cible par l’aviation américaine, que les missiles pourraient l’avoir rattrapé, selon des sources militaires américaines haut placées citées par des médias.

Le jeune homme "faisait partie de nos cibles", a indiqué jeudi à l’AFP un responsable du Pentagone sous couvert d’anonymat. "Je pense qu’on l’a eu", a-t-il ajouté.

Pour son père, David Drugeon voulait "mourir en martyr". "Je n’ai pas de mots, les mots me manquent mais comme il m’avait dit: il aurait aimé mourir en martyr. Mais si c’est ça, à 25 ans, mourir en martyr, tout ça pour quoi?", a demandé M. Drugeon.

Apprenant que son fils, qui allait avoir 25 ans en ce mois de novembre, était devenu un expert en explosifs, M. Drugeon s’est exclamé: "Jamais j’aurais imaginé qu’il montre cette voie-là, cette voie de la guerre, de la bombe, de l’envie de tuer".

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