Migrants: Merkel empêtrée dans une crise politique en Allemagne
Angela Merkel et l’aile la plus à droite de sa coalition gouvernementale se réunissent lundi pour une ultime tentative de résoudre un conflit sur les migrants qui menace de faire tomber le gouvernement allemand.
Le président de cette formation et ministre allemand de l’Intérieur, Horst Seehofer, qui mène la fronde, a offert dimanche de démissionner de ses deux fonctions face à l’impasse, lors d’une réunion de la CSU qui a duré une dizaine d’heures à Munich. Avant, en fin de compte, de suspendre sa décision.
"J’ai dit que je remettais les deux postes à disposition et que j’exécuterai cette décision dans les trois jours à venir", a-t-il déclaré dans la nuit de dimanche à lundi.
Dans l’intervalle, des discussions de la dernière chance au plus haut niveau sont prévues lundi après-midi entre son parti et la formation de centre-droit de la chancelière (CDU) "dans l’espoir de trouver un accord", a dit M. Seehofer.
Le conflit porte sur le traitement des migrants arrivant en Allemagne mais déjà enregistrés dans d’autres pays de l’UE.
Le ministre veut les refouler à la frontière, ce que refuse Angela Merkel pour ne pas créer "d’effet domino" en Europe.
Devant les cadres de son mouvement M. Seehofer a évoqué trois scénarios.
Il indiqué qu’il pouvait soit rentrer dans le rang, soit passer outre les objections d’Angela Merkel et imposer de son propre chef les refoulements aux frontières – ce qui entraînerait toutefois son limogeage et l’éclatement du gouvernement de coalition – ou enfin démissionner. Option qu’il privilégie donc à ce stade.
Un départ aurait des conséquences potentiellement graves pour l’avenir du gouvernement allemand.
La question serait alors de savoir si le parti du ministre quitte lui aussi, ou non, la coalition. Dans pareil cas, la chancelière se verrait privée de majorité à la chambre des députés, avec sans doute à la clé des élections anticipées.
Mais le parti bavarois pourrait aussi se contenter de remplacer M. Seehofer, dont les relations avec Angela Merkel sont devenues exécrables, par une personnalité plus souple.
Il ne sera pas aisé toutefois lundi de trouver un terrain d’entente entre les deux formations longtemps alliées mais aujourd’hui largement ennemies.
Angela Merkel reste en effet inflexible. Et elle a obtenu dimanche soir à Berlin le soutien quasi-unanime des instances dirigeantes de son parti CDU pour refuser toute décision "unilatérale" nationale sur les migrants.
Ce dernier conflit au sein du camp conservateur allemand a éclaté vers la mi-juin lorsque la chancelière a bloqué le projet de son ministre sur les refoulements à la frontière.
Mais il est en réalité quasi-permanent depuis la décision controversée prise en 2015 par Angela Merkel d’ouvrir les frontières de son pays à des centaines de milliers de candidats à l’asile.
Le parti bavarois CSU n’a cessé depuis trois ans de dénoncer ce choix et de peser pour obtenir davantage de fermeté en matière d’asile. Son offensive paraît surtout viser Angela Merkel elle-même, perçue désormais comme un obstacle par les courants conservateurs les plus durs en raison d’une politique jugée trop centriste.
Le parti CSU est en outre aiguillonné par la perspective d’élections régionales en octobre en Bavière, où il risque de perdre sa majorité absolue face à la poussée de l’extrême droite anti-migrants.
Le ministre de l’Intérieur avait fixé un ultimatum à début juillet à Angela Merkel, menaçant d’imposer ses refoulements aux frontières faute de mesures "équivalentes" au niveau européen.
Angela Merkel pensait pouvoir amadouer ce parti rebelle grâce aux mesures prises lors du dernier sommet européen pour réduire les flux migratoires. Mais Horst Seehofer les a qualifiées dimanche d’"insuffisantes".
Quelle que soit l’issue de la crise gouvernementale, Angela Merkel en ressortira forcément un peu plus affaiblie politiquement.
Après presque 13 ans de pouvoir, elle est désormais ouvertement contestée en Allemagne sur sa politique migratoire et souvent critiquée à l’étranger, notamment en Europe de l’Est et par Donald Trump.