Tunisie: les Libyens ont évité un désastre touristique à Djerba

Tunisie: les Libyens ont évité un désastre touristique à Djerba
Parmi les dizaines de milliers de Libyens qui se sont réfugiés ces six derniers mois en Tunisie, les plus fortunés se sont installés à Djerba et ont évité le désastre touristique à l’île, boudée par les Européens après le soulèvement qui a emporté Ben Ali le 14 janvier.

"Le malheur des uns a fait le bonheur des autres", résume un chauffeur de taxi, Jamel.

Alors que 2011 s’annonce d’ores et déjà comme la pire année pour le tourisme tunisien –un secteur qui représente 7% du PIB et emploie 400.000 personnes–, Djerba a pu limiter les dégâts grâce aux réfugiés.

L’île de 139.00 habitants, dont 80% vivent directement ou indirectement du tourisme, accueille toujours quelques milliers de Libyens, qui attendent la chute totale du régime Kadhafi et la fin des combats pour rentrer chez eux.

De gros bolides immatriculés en Libye occupent les places de parkings, et leurs propriétaires remplissent les restaurants, cafés, commerces et maisons de location près de la mer.

"Sans eux, ma recette aurait été proche de zéro", reconnaît Chérif, 39 ans, un épicier à Midoun.

"Depuis le soulèvement contre le régime libyen nous enregistrons un chiffre d’affaires de 100.000 dinars par jour, soit une augmentation de 10% par rapport à l’année 2010", indique pour sa part Adel Khlifi, sous-directeur d’une grande surface à Houmet Souk, chef lieu de l’île.

Selon lui, les Libyens sont "de très bons clients" qui consomment beaucoup les produits alimentaires. "Le coût de leurs achats dépasse les 120 dinars par famille (environ 60 euros)", ajoute M. Khlifi.

"C’est vrai que l’argent en devise (des touristes européens) nous manque mais on ne peut pas nier que nous avons été sauvés par nos frères libyens", estime Salem, 49, gérant d’un restaurant dans la zone touristique de Djerba, qui accueille depuis deux mois une cinquantaine de Libyens chaque jour.

"Au moins on n’a pas fait faillite cette année", renchérit Mohamed, un responsable d’un café branché à Midoun.

Accueillant ses premiers clients avec un large sourire peu après la rupture de jeûne en ce mois de ramadan, il ordonne aux serveurs de "les gâter comme il se doit".

"Ils sont loin de chez eux, leur pays est en guerre. Ils ont besoin qu’on leur remonte le moral. Ils méritent bien ça avec ce qu’ils dépensent", explique Mohamed.

Dans quelques hôtels, un prix spécial pour les Libyens a été affiché à la réception ne dépassant pas les 60 dinars (environ 30 euros) pension complète.

"C’est un prix symbolique pour ces gens qui vivent une situation difficile. Il faut les aider dans cette période", indique Adbelwahab Majoul, directeur d’un hô tel quatre étoiles.

Les VIP, eux, ont séjourné dans les cinq étoiles, réservés au prix fort. Ces palaces ont accueilli au cours des derniers mois des officiels du régime et des représentants de la rébellion pour des discussions secrètes à l’abri des regards.

Mais la présence libyenne et ses conséquences a aussi irrité. Et certains Djerbiens attendent avec impatience le départ de leurs hô tes.

"Dès l’arrivée des Libyens, les prix des légumes et des fruits ont presque doublé, s’énerve Ali, un fonctionnaire. "On reste plus d’une heure à faire la queue pour acheter de l’eau et du lait tellement nos magasins sont envahis par les Libyens", ajoute-t-il.

"Je comprends parfaitement leur situation, mais ils doivent pas abuser", estime Salem, un bijoutier, qui peste contre "le comportement hautain et impoli de certains" et évoque des rixes entre Libyens ou avec les habitants de l’île surpeuplée.

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