Rappelant que « seulement 3 % des personnes qui tentent d’arrêter de fumer seules y parviennent », les auteurs du rapport ont fortement insisté sur l’importance pour le fumeur de se faire accompagner dans son sevrage par un médecin. « La proportion passe alors à 20 %, rappelle le Dr Cédric Grouchka, membre du collège de la HAS. Il est plus facile d’arrêter la cocaïne ou l’alcool que la cigarette. »
Dans ce rapport, le médecin généraliste se voit confier un rôle déterminant dans la lutte contre le tabagisme. « Le médecin de famille est un interlocuteur de long terme pour les patients, cela confère une valeur particulière à sa parole dont il faut profiter », analyse le Pr Albert Ouazana, qui a présidé les travaux de la HAS sur le sujet. À ce titre, l’autorité souhaiterait que les médecins généralistes se montrent davantage proactifs sur le tabagisme. « Il ne s’agit plus de demander simplement au patient s’il fume, mais de lui dire “Il faudrait que vous arrêtiez, avez-vous pensé à fixer une date ?”, et ce quel que soit le motif de la consultation », résume le Pr Ouazana.
« Un risque toxique bien moindre»
Le Dr Grouchka admet néanmoins que cette recommandation de principe risque de soulever rapidement la question de la création d’une consultation spécifique et rémunérée pour les généralistes, déjà débordés. Sur le plan financier, la HAS, qui n’a pas de pouvoir décisionnel, recommande aux décideurs la prise en charge financière complète des moyens de sevrage (consultation et traitements), l’efficacité de cette mesure ayant été démontrée à l’étranger. Aujourd’hui, les substituts nicotiniques sont remboursés à hauteur de 50 euros par an.
Avec l’explosion du nombre de fumeurs affirmant avoir arrêté de fumer grâce à l’e-cigarette, la position de la HAS sur le sujet était très attendue. Elle fait le choix du pragmatisme. « Il nous est impossible de recommander l’e-cigarette comme produit de sevrage, car nous manquons d’études scientifiques pour évaluer son efficacité et ses effets sur la santé à long terme, explique Cédric Grouchka. Toutefois, on peut penser que le risque toxique est bien moindre à court terme qu’avec une cigarette classique. C’est pourquoi nous invitons à ne pas dissuader les fumeurs qui vapotent si cela reste l’affaire de quelques mois avec l’objectif d’arrêter de fumer. Cela évite au médecin de casser la motivation du patient et permet d’engager une discussion sur une stratégie à plus long terme. »
Sans surprise, les substituts nicotiniques (patchs, gommes, sprays, pastilles…) restent le premier traitement à prescrire à une personne souhaitant arrêter de fumer. Les médicaments à base de varénicline (Champix) et bupropion (Zyban), accusés par plusieurs études de déclencher des dépressions et des idées suicidaires, avant d’être récemment blanchis, ne doivent être prescrits qu’après l’échec de ces premières méthodes.