L’annonce des résultats provisoires du second tour de l’élection présidentielle du 12 août à la télévision nationale par le ministre de l’Administration territoriale a été reportée de mercredi à jeudi matin, l’acheminement de certains procès-verbaux de localités du nord et du centre de cet immense pays ayant pris du retard, ont indiqué des responsables gouvernementaux.
Les observateurs s’attendent à un taux de participation très bas, le scrutin n’ayant pas passionné une population lassée par la persistance des attaques jihadistes, auxquelles se mêlent souvent des violences intercommunautaires, et dont près de la moitié vit sous le seuil de pauvreté bien que le Mali soit redevenu le premier producteur africain de coton et que son économie enregistre une croissance supérieure à 5 % depuis plusieurs années.
La communauté internationale attend du vainqueur, qui entrera en fonctions le 4 septembre, qu’il relance l’accord de paix conclu en 2015 avec l’ex-rébellion à dominante touareg, dont la mise en oeuvre accumule les contretemps et qui n’a pas empêché les violences de se propager du nord vers le centre du pays et vers le Burkina Faso et le Niger voisins.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, en grande partie chassés ou dispersés par une intervention militaire lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France, qui se poursuit actuellement.
L’ONU mène également dans le pays sa plus importante mission actuelle, tandis que la force du G5 Sahel s’y déploie progressivement.
Opposition combative
Bien que son bilan soit mitigé, Ibrahim Boubacar Keïta, dit "IBK", a toutes les chances, à 73 ans, d’obtenir un second mandat. Il a laissé dire sans pratiquement broncher les partisans de l’opposition, qui l’accusent d’avoir truqué le scrutin lors des deux tours, avec l’aide dans le nord des groupes armés signataires de l’accord de paix, ce que ceux-ci ont démenti.
Avec ses 41,70 % des suffrages récoltés au premier tour, IBK dispose d’une confortable avance sur Soumaïla Cissé, qui n’a été crédité que de 17,78 % des voix et n’a pas su réunir l’opposition derrière sa bannière.
Soumaïla Cissé, largement battu en 2013 par IBK, s’est pourtant montré combatif jusqu’au bout, assurant qu’il rejetait à l’avance une partie des résultats, notamment ceux de "plusieurs localités du nord", caractérisés selon lui par "du bourrage d’urnes".
Il a affirmé que la victoire lui était acquise si les résultats qu’il juge litigieux étaient écartés.
Le camp de M. Cissé a aussi accusé mercredi le pouvoir d’avoir détenu arbitrairement pendant trois jours, "torturé" et "maltraité" un membre de son équipe de communication, un technicien-monteur ivoirien.
Appels au calme
Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a appelé "toutes les parties à conserver le calme jusqu’à la conclusion du processus électoral, (tout) en évitant les rhétoriques incendiaires".
A Bamako, la communauté internationale représentée au Mali a "rappelé aux deux candidats leurs engagements en faveur de campagnes pacifiques avant et après le processus électoral", les encourageants "fortement" à "utiliser les canaux légaux et constitutionnels pour régler les différends".
Le second tour s’est déroulé dimanche dans un climat plus apaisé. Un président de bureau de vote a bien été tué près de Tombouctou (nord) par des jihadistes présumés, mais seuls 490 bureaux de vote –sur 23.000– n’ont pu ouvrir, soit moitié moins que le 29 juillet. Ce succès est dû selon le gouvernement à la "montée en puissance" de l’armée, qui avait déployé 36.000 hommes, 6.000 de plus qu’au premier tour.
Depuis le début de la semaine, un nombre accru de policiers et de militaires, mieux armés que d’habitude, sont visibles à Bamako, notamment près du domicile privé du président, dans le centre-ville et devant des bâtiments officiels, selon un correspondant de l’AF