Maria Latifi, décédée à 66 ans des suites d’un cancer ravageur, est née comme elle aimait à le dire, sous le signe du travail, d’un père projectionniste et une mère au foyer avec laquelle elle avait une relation fusionnelle. Ouvreuse au cinéma de l’Agdal, femme de chambre dans un hôtel parisien, elle a toujours travaillé pour payer ses études. Détentrice d’un doctorat à la Sorbonne nouvelle, agrégée de lettres modernes de l’université de Rabat, Maria Latifi aimait les belles lettres, les livres, les auteurs. « Les plus belles émissions culturelles, on les doit à Maria. Regards et namadij, diffusées sur 2M sont des bouillons de culture inoubliables », rappelle ce journaliste de la chaine de télévision de Ain Sebaa.
Femme de culture, figure médiatique,elle bouillonnait d’idées, de projets, de choses à accomplir. Maria a vécu avec amertume son départ à la retraite le 31 décembre 2017, même si elle allait inaugurer une nouvelle séquence professionnelle en dirigeant un centre pour femmes et enfants en difficulté. Est-ce vraiment un hasard si une semaine après son départ à la retraite, elle a son premier malaise, le 8 janvier 2018 ? Certes, la maladie était là, tapie dans le noir depuis de nombreux mois. Silencieuse, ravageuse, impitoyable.
Maria Latifi avait des rapports bien à elle avec l’ambition et les plans de carrière. Elle aurait pu se consacrer juste à son ascension professionnelle. C’est exactement ce qu’elle n’a pas fait en se dévouant pour ses dix frères et sœurs. « Nous avons perdu notre père.
Qu’allons- nous faire sans elle ? », dit dans un souffle son frère Driss, éperdu de douleur. Jamal, Amina, Nadia, sont orphelins. Au plus fort de la maladie, alors que l’on sentait la fin toute proche, Maria comptait du fond de son lit sa tribu. « Entre les frères et les sœurs et les neveux, nous sommes une soixantaine », lançait-elle fièrement.
Partie à 66 ans, dans la dignité et l’apaisement, entourée de ceux et celles qu’elle aime, Maria Latifi est juste passée de l’autre côté. Sa voix rauque et chaleureuse, sa générosité, son sens du partage, son humour dévastateur, son immense culture et, surtout, sa modestie manquent déjà à tous ses amis. Ceux et celles qui ont tenu à l’accompagner durant les 5 mois de sa maladie ont définitivement compris que c’est une grande qui s’en est allée.