Libye : les forces pro-Haftar repoussées, réunion du Conseil de sécurité

Les forces progouvernementales en Libye ont repoussé vendredi des combattants du maréchal controversé Khalifa Haftar engagés dans une offensive pour prendre la capitale Tripoli, une bataille susceptible de plonger le pays dans un nouveau conflit.

Face au risque d’embrasement, le Conseil de sécurité de l’ONU doit se réunir en urgence à 19H00 GMT à la demande du Royaume-Uni, pour discuter de la situation dans cet Etat pétrolier d’Afrique du nord, après des appels internationaux à la retenue.

L’escalade a coïncidé avec la visite en Libye du patron de l’ONU Antonio Guterres qui a rencontré le Premier ministre libyen Fayez al-Sarraj jeudi à Tripoli et doit voir vendredi son rival, le maréchal Haftar, dans l’est du pays.

Jeudi, les forces pro-Haftar ont lancé une offensive pour prendre Tripoli, où siège le gouvernement d’union nationale (GNA) dirigé par M. Sarraj et reconnu par la communauté internationale. M. Sarraj a ordonné à ses combattants et milices alliées de les repousser.

Les pro-Haftar ont progressé en direction de la capitale mais vendredi avant l’aube, des dizaines de leurs combattants ont été chassés après un "court accrochage" d’un barrage de sécurité à 27 km à l’ouest de Tripoli, a indiqué une source de sécurité.

Des dizaines de combattants ont été faits prisonniers et leurs véhicules saisis, selon cette source. Des photos de ces "prisonniers" en uniformes militaires et assis à même le sol dans un lieu inconnu, circulent sur les réseaux sociaux. Il n’était toutefois pas possible de les authentifier dans l’immédiat.

Selon un journaliste de l’AFP sur place, M. Sarraj, accompagné de commandants de la région occidentale, s’est rendu au barrage repris par ses forces, dans un convoi d’une vingtaine de véhicules, dont des pick-up armés de canons anti-aériens. Il a échangé brièvement avec les hommes armés au barrage avant de prendre la route vers Tripoli.

Jeudi, Khalifa Haftar a ordonné à ses forces d’"avancer" en direction de Tripoli. "L’heure a sonné", a-t-il dit dans un message sonore, promettant d’épargner les civils, les "institutions de l’Etat" et les ressortissants étrangers.

Avant lui, le général Ahmad al-Mesmari, porte-parole de l’ANL, avait annoncé mercredi la préparation de cette offensive pour "purger l’ouest" libyen "des terroristes et des mercenaires".

La force de protection de Tripoli, une coalition de milices tripolitaines fidèles au GNA, a annoncé aussitôt une contre-offensive pour stopper l’avancée de ses adversaires.

Elle a donné le nom de "Ouadi Doum 2" à l’opération, en allusion à la défaite en 1987 du maréchal Haftar, alors officier sous le régime déchu de Mouammar Kadhafi, dans la région de Ouadi Doum à la frontière du Tchad. M. Haftar s’était alors fait prisonnier.

De puissants groupes armés de la ville de Misrata (ouest), loyaux au GNA, se sont dits "prêts à stopper l’avancée maudite" des pro-Haftar.

Depuis le renversement en 2011 de Mouammar Kadhafi tué après huit mois de révolte, la Libye est plongée dans l’insécurité avec la présence de nombreuses milices qui font la loi. Le GNA dans l’ouest, où se trouve Tripoli, et une autorité dans l’est contrôlée par l’Armée nationale libyenne (ANL), autoproclamée par Khalifa Haftar, se disputent le pouvoir depuis 2015.

Craignant un embrasement, le Kremlin a mis en garde contre une "reprise du bain de sang" et appelé à un règlement "pacifique et politique" du conflit.

Avant la Russie, Washington, Paris, Londres, Rome et Abou Dhabi ont appelé "toutes les parties" libyennes à faire baisser "immédiatement les tensions".

M. Guterres a lui appelé à "l’arrêt de tous les mouvements militaires (…) Il n’existe pas de solution militaire en Libye. La solution doit être politique".

La nouvelle escalade est intervenue avant une Conférence nationale sous l’égide de l’ONU prévue mi-avril à Ghadamès (sud-ouest libyen), afin de dresser une "feuille de route" avec la tenue d’élections pour tenter de sortir le pays de l’impasse.

Les efforts diplomatiques des dernières années n’ont pas permis une réelle percée en vue d’une solution politique.

"Le risque d’embrasement est accru", a jugé Jalel Harchaoui, chercheur à l’Institut Clingendael de La Haye. "Prendre Tripoli (…) reste une possibilité" pour Khalifa Haftar, appuyé par différents pays du Golfe, avance-t-il, faisant allusion aux Emirats arabes unis, à l’Egypte et à l’Arabie saoudite, où il a été reçu fin mars.

Outre l’est libyen, le maréchal Haftar contrôle des pans de la vaste région désertique du Sud. Sebha, chef-lieu du sud, ainsi qu’un des plus importants champs pétroliers du pays, à al-Charara, sont passés sous son contrôle.

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