La Tunisie attend une possible démission du Premier ministre

Le Premier ministre tunisien pourrait remettre mardi sa démission au chef de l’Etat, selon son porte-parole, après l’échec de son projet de cabinet apolitique, torpillé par son parti islamiste, alors que le pays est enlisé dans sa pire crise politique depuis la révolution.

Hamadi Jebali "va rencontrer le chef de l’Etat (Moncef Marzouki), et il peut y avoir démission", a dit à l’AFP le porte-parole du chef de gouvernement, Ridha Kazdaghli.

La rencontre est prévue à 17H30 GMT selon la présidence, et la presse y a été conviée.

Par ailleurs, deux sources au sein du gouvernement et une autre dans le parti islamiste au pouvoir Ennahda ont indiqué, toutes sous couvert de l’anonymat, que M. Jebali s’apprêtait à quitter ses fonctions.

Selon un membre du gouvernement, M. Jebali a demandé aux ministres "de continuer d’expédier les affaires courantes". "Il n’a pas prononcé le mot +démission+ mais on a très bien compris qu’il allait voir le président pour l’annoncer", a indiqué cette source.

"Il a clairement annoncé son départ", a résumé un autre membre du cabinet.

Un responsable d’Ennahda a aussi dit que M. Jebali "allait annoncer sa démission pour honorer sa promesse de départ" en cas d’échec de son initiative de former un gouvernement apolitique, alors que ce projet a échoué lundi face à l’opposition de son propre parti.

Cette source a précisé cependant que rien n’empêchait que M. Jebali soit désigné à sa propre succession et chargé de former une nouvelle coalition gouvernementale.

"Irresponsabilité" des dirigeants

Les partis politiques, en pourparlers avec M. Jebali, ont indiqué que si l’idée d’un cabinet apolitique était enterrée, un compromis autour d’un gouvernement mêlant technocrates et personnalités politiques était encore une possibilité.

L’objectif affiché reste de pacifier une situation électrique depuis l’assassinat le 6 février de l’opposant anti-islamiste Chokri Belaïd, de créer les conditions pour l’organisation d’élections et pour que l’Assemblée nationale constituante (ANC) sorte enfin de son impasse sur la rédaction de la Constitution.

Mais les lignes de fracture restent profondes. L’essentiel de l’opposition et les alliés laïques des islamistes d’Ennahda insistent pour que les ministères régaliens soient confiés à des indépendants. Ennahda, la principale force politique du pays, reste réticent sur ce point.

Selon un haut responsable gouvernemental interrogé par l’AFP, l’actuelle crise a "paralysé le fonctionnement du gouvernement".

D’ailleurs, l’agence de notation Standard and Poor’s a abaissé d’un cran la note souveraine de la Tunisie à "BB-" contre "BB", assortie d’une perspective négative en raison "des tensions politiques" et des "risques pour la transition démocratique".

Parallèlement, la Tunisie fait face aux frustrations sociales qui dégénèrent régulièrement en violences, le chômage et la misère ayant déjà été au coeur de la révolution qui a renversé Zine El Abidine Ben Ali en janvier 2011.

Deux semaines après le meurtre de Chokri Belaïd, aucune information n’a été donnée sur l’état de l’enquête, le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Khaled Tarrouche, se bornant à dire qu’elle avançait "sérieusement". Les proches du défunt accusent Ennahda de ce crime, ce que les islamistes démentent.

Des éditorialistes brocardaient dans ce contexte une classe politique incapable de résoudre les vrais problèmes du pays. "Il n’y a pas de mots assez forts et durs pour stigmatiser l’irresponsabilité de nos gouvernants qui mènent le pays à la ruine", s’insurge ainsi Le Quotidien

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