G20: Trump snobe Poutine et fait grimper la tension
Avant même le coup d’envoi du G20 en Argentine, l’imprévisible Donald Trump a brusquement fait grimper la tension en annulant sa rencontre prévue avec son homologue russe Vladimir Poutine, sur fond d’escalade entre Moscou et Kiev.
"En partant du fait que les navires et les marins n’ont pas été restitués par la Russie à l’Ukraine, j’ai décidé qu’il serait mieux pour toutes les parties concernées d’annuler ma rencontre préalablement prévue en Argentine avec le président Vladimir Poutine", a-t-il tweeté, peu après avoir quitté Washington.
Une heure avant le président américain, coutumier des volte-face brutales, avait encore confirmé aux journalistes cette rencontre bilatérale, dans un contexte "très opportun", avait-il même dit.
"C’est comme ça que les grands leaders agissent!", s’est réjoui le président ukrainien Petro Porochenko en répercutant sur Twitter le message de Donald Trump, lui qui appelle par exemple l’Otan à intervenir contre la Russie.
Sans succès jusqu’ici. Sur la scène internationale, l’heure est plutôt à la retenue: constatant "une grande préoccupation" sur ce dossier, le secrétaire de l’ONU Antonio Guterres s’est contenté d’espérer que "l’escalade pourra être contenue", peu après son arrivée à Buenos Aires.
Le Kremlin a lui réagi avec froideur à l’annulation de la réunion bilatérale, qui ne lui avait pas été signifiée officiellement. Un porte-parole a noté que Vladimir Poutine "aurait quelques heures de plus à consacrer à des réunions utiles en marge du sommet" si ce tête-à-tête tombait à l’eau.
La Russie est accusée d’ingérence massive dans la présidentielle américaine de 2016, un scandale aux multiples ramifications qui a connu jeudi un nouveau rebondissement, défavorable à Donald Trump.
Son ancien avocat Michael Cohen a avoué avoir menti à propos d’un projet immobilier en Russie impliquant le conglomérat de Donald Trump. Et s’est vu illico qualifier de "personne très faible" par un président américain de plus en plus nerveux face à la tentaculaire enquête du procureur spécial Robert Mueller.
Tandis que les avions des dirigeants des principales puissances de la planète se posaient à Buenos Aires, celui d’Angela Merkel a été contraint à un atterrissage d’urgence à Cologne, dans l’ouest de l’Allemagne, en raison d’un problème technique. Dans l’incapacité de repartir dans l’immédiat, la chancelière allemande, qui a amorcé son retrait politique, manquera le début du sommet: elle devait prendre un vol commercial avec une délégation réduite vendredi.
Les chefs d’Etat et de gouvernement des vingt premières économies mondiales se réunissent vendredi et samedi dans une capitale argentine sous haute surveillance, alors que des manifestations sont prévues hors de la zone ultra-sécurisée.
Les autorités argentines, mises en difficulté par des affrontements samedi dernier autour d’un match de foot à haut risque, ont prévenu qu’elle ne tolérerait "aucune violence" en marge du G20.
Avant même son arrivée en Argentine, le président américain a donc imposé son rythme à cette réunion, dont le temps fort annoncé sera sa rencontre avec le président chinois Xi Jinping. Les deux dirigeants vont tenter d’enrayer l’escalade de représailles douanières entre les deux pays, qui menace la croissance mondiale.
"Nous espérons que les Etats-Unis et la Chine pourront faire un pas l’un vers l’autre", a dit jeudi un porte-parole du ministère chinois du commerce.
Donald Trump, lui, maintient la pression, louant d’un côté sur Twitter les taxes douanières contre la Chine, qui emplissent les caisses américaines. Mais se disant aussi "très près" de conclure un accord commercial avec Pékin.
Les autres protagonistes du G20, groupe qui cumule 85% du PIB mondial, tentent de s’organiser face au tourbillon Trump. Le président français Emmanuel Macron a ainsi annoncé qu’il organisait une réunion de "coordination" vendredi matin pour les Européens, sur tous les sujets délicats du sommet.
Parmi eux, la lutte contre le changement climatique, qui ne fait plus consensus au G20, surtout depuis que les Etats-Unis ont dénoncé l’Accord de Paris. "Il y a eu un certain affaiblissement de la volonté politique (sur cette question), et il est absolument nécessaire de rétablir cette volonté politique", a déclaré Antonio Guterres.