France: micmac autour d’une démission du ministre de l’Intérieur

Partira, partira pas? La démission du ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, refusée par le président Emmanuel Macron, brouille la rentrée politique en France, perçue comme une "opération de communication" pour les uns, une "farce" pour les autres.

Gérard Collomb, 71 ans, a affirmé mardi "maintenir" sa proposition de démission, 24 heures après que le président Emmanuel Macron a refusé une première fois de voir le ministre de l’Intérieur quitter son poste pour se consacrer en 2019 à sa candidature à la mairie de Lyon (centre-est), la deuxième métropole de France.

"Compte tenu des rumeurs et des pressions qu’il peut y avoir, je ne veux pas que le fait que je sois candidat quelque part demain puisse troubler la marche du ministère de l’Intérieur", a justifié M. Collomb, dans un entretien au quotidien le Figaro.

"Il faut une clarté vis-à-vis de nos concitoyens et une clarté vis-à-vis des Lyonnais, donc je maintiens ma proposition de démission", a-t-il ajouté.

Face à cette récidive, Emmanuel Macron et le Premier ministre Edouard Philippe ont annoncé mardi qu’ils allaient trancher sur le sort de Gérard Collomb.

Emmanuel Macron "attend désormais les propositions du Premier ministre", a annoncé la présidence, alors que son entourage regrette que le ministre se soit mis en situation "de devoir démissionner".

Le Premier ministre a, lui, annoncé aux députés qu’il proposerait au président français "les décisions qui s’imposent" à propos du ministre de l’Intérieur.

"J’exercerai la totalité des attributions constitutionnelles qui me sont dévolues. Je dirige l’action du gouvernement et j’aurai l’occasion de proposer au président les décisions qui s’imposent", a annoncé Edouard Philippe, interpellé par un député lors des questions au gouvernement.

Constitutionnellement, le président de la République nomme et met fin aux fonctions des ministres sur proposition du Premier ministre.

Episode assez inédit

"Cet épisode est assez inédit et c’est assez difficilement lisible", constate auprès de l’AFP le politologue Pascal Perrineau, professeur à Sciences-Po Paris.

"Si on se dit que c’est entièrement monté, on ne voit pas l’intérêt du montage. Si c’est pas un montage, ça fait désordre", fait-il valoir.

"Ça va durer longtemps ce sketch?", s’est interrogée sur Twitter la patronne de l’extrême droite, Marine Le Pen, fustigeant une direction "Cirque Pinder", du nom d’un célèbre cirque français.

"M. Collomb a le droit à la retraite, qu’il quitte ce ministère, qu’il aille s’occuper de ses petits-enfants, des pâquerettes", a lancé de son côté l’ex eurodéputé écologiste Daniel Cohn-Bendit.

Pour l’opposition, l’épisode fragilise un ministère stratégique: "c’est une farce", a déploré le député de droite Julien Aubert, tandis que Jean Léonetti, une autre personnalité de droite, raillait "une opération de communication".

Le "problème Collomb", tel que le nomme aujourd’hui un membre du gouvernement, traduit l’évolution d’un homme, autrefois très proche d’Emmanuel Macron, mais qui se montre désormais critique à l’endroit du chef de l’État.

Début septembre, le ministre de l’Intérieur pointait ainsi "le manque d’humilité de l’exécutif".

Quinze jours plus tard, Gérard Collomb avait à nouveau détonné en annonçant son départ du gouvernement l’an prochain pour se présenter aux élections municipales à Lyon (centre-est) en 2020, prenant de court le chef d’Etat.

Il a aussi été éclaboussé par l’affaire Benalla, du nom de cet ancien collaborateur d’Emmanuel Macron inculpé pour avoir violenté des manifestants alors qu’il accompagnait les forces de l’ordre, provoquant une tempête médiatique et une crise politique importante cet été.

Depuis, de nombreuses voix s’étaient élevées pour réclamer sa démission immédiate, pour éviter de déstabiliser l’action de son ministère, alors que la France a été victime d’une vague d’attentats jihadistes qui a fait 246 morts depuis 2015.

Lundi, Gérard Collomb avait donc présenté sa démission à Emmanuel Macron… qui l’a refusée. "Le président de la République lui a renouvelé sa confiance et lui a demandé de rester pleinement mobilisé sur sa mission pour la sécurité des Français", a indiqué lundi soir la présidence à l’AFP.

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