En Libye, des municipales font figure de test avant les élections législatives

Les élections municipales récemment organisées dans plusieurs régions de l’ouest libyen, dont Tripoli, ont fait figure de test à l’aube d’une année qui doit marquer la tenue de scrutins nationaux, dans l’espoir de sortir la Libye du chaos.

Jeudi, avec plusieurs années de retard et sous un important dispositif policier, les électeurs de Hay al-Andalous, un quartier résidentiel de la capitale Tripoli, ont pu élire leurs représentants locaux. Des scrutins identiques ont eu lieu dans les localités de trois autres circonscriptions de la Tripolitaine (ouest).

Ces élections ont été « un test direct et décisif de la capacité des autorités à organiser des élections générales », affirme à l’AFP l’analyste libyen, Mahmoud Khalfallah.

Si les résultats ne sont pas encore connus, ces scrutins valaient en premier lieu au titre de répétition. Et de ce point de vue, elles se sont « déroulées sans accroc, et on peut être optimistes », ajoute-t-il.

L’universitaire Amani al-Hajrassi confirme, tout en relevant que « l’enjeu » en fin d’année « ne sera pas le même ».

« La classe politique accorde peu d’intérêt aux municipales, qui ont peu d’impact sur la prise de décision », dit-il.

Dans ce pays en conflit et encore hanté par le régime de Mouammar Kadhafi (1969-2011), un cessez-le-feu a été arraché en octobre sous l’égide de l’ONU entre les pouvoirs rivaux –le gouvernement d’union (GNA) basé à Tripoli et reconnu par l’ONU d’un coté, les autorités parallèles de l’Est libyen de l’autre.

Un accord a également été annoncé sur la tenue de législatives en décembre 2021, les premières depuis l’implosion du pays en 2014.

Ces élections doivent permettre d’élire le premier président de la Libye moderne, qui fut une monarchie de son indépendance en 1951 jusqu’au coup d’Etat orchestré par Kadhafi en 69.

Mais les deux camps peinent à s’accorder sur les noms des futurs dirigeants de la transition.

 

 « Premier jalon »

 

Durant les scrutins locaux organisés la semaine passée, les électeurs rencontrés par l’AFP ont affiché un optimisme prudent.

Les municipales de Tripolitaine, région qui abrite la moitié des sept millions d’habitants de Libye, « sont le premier jalon des législatives », s’est réjoui Khaled al-Nouri, un fonctionnaire, à la sortie du bureau de vote, l’index marqué à l’encre bleue.

Elles doivent fournir « un indicateur sur la mobilisation des citoyens », a jugé Fathiya Al-Misrati, une enseignante patientant devant un lycée avant de voter.

Mais, en attendant, « rien n’a changé depuis six ans, avec des services totalement défaillants et des coupures fréquentes d’eau et d’électricité », a tempéré la fille de cette électrice.

Aussi, lors de ces scrutins, le taux de participation s’est finalement avéré plutôt décevant –de seulement 22% à Hay al-Andalous à 42% à Zliten (environ 160 km à l’est de Tripoli).

Il s’agissait pourtant des premières municipales depuis celles de 2013-14 organisées sous l’impulsion du Parlement élu en 2012.

Prévues quatre ans plus tard, de nouvelles élections locales n’ont pu avoir lieu en raison des profondes divisions du pays.

 

 « Réunification »?

 

A la lutte fratricide entre le GNA et le camp du maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l’Est, se sont ajoutées au niveau local celles entre notables, dans un pays historiquement fragmenté.

En 2019 et 2020, plusieurs localités sont enfin parvenues à organiser des scrutins.

Ailleurs, notamment en Tripolitaine, outre l’insécurité, le manque de moyens et la pandémie de nouveau coronavirus ont également retardé les municipales, plaide Salem Ben Tahia, le président du comité électoral des conseils municipaux basé à Tripoli.

Mais les divisions ont constitué le principal handicap. Les autorités de Tripoli n’ont ainsi pas pu organiser de scrutins dans l’Est car les autorités rivales ont créé leur propre commission électorale.

En avril 2019, à la suite de l’offensive des pro-Haftar sur Tripoli, de nombreux bureaux de vote et le siège de la commission ont été « sérieusement endommagés », note M. Ben Tahia.

Depuis, grâce à un appui étranger, ces bâtiments ont été reconstruits, les employés formés et le matériel renouvelé, là aussi de bon augure pour les prochaines législatives.

Désormais « nous oeuvrons à la réunification des deux commissions (électorales). Dès la mise en place d’un gouvernement unifié, nous pourrons organiser des élections dans l’ensemble du territoire », assure le responsable.

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