Scepticisme en Europe sur la taxe financière franco-allemande
Alors que Bercy et Berlin annoncent des propositions « début septembre » pour mettre en œuvre la taxe annoncée hier par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, Londres et Dublin sont plutôt réticents. Inquiétude également sur les marchés financiers européens.
Où s’applique cette taxe ?
C’est la principale question que se posent plusieurs gouvernements. A Dublin, le ministre des Finances prévient : pas question que les pays de la zone euro soient les seuls à mettre la main à la poche. "Nous ne pouvons pas avoir une situation où il y a une taxe sur les transactions à Dublin et pas de taxe sur les transactions à Londres", note Michael Noonan. Réponse de Berlin : pas de souci, la taxe doit s’appliquer aux 27 membres de l’Union européenne. Sauf que ça n’est pas du goût de Londres. "Toute taxe sur les transactions financières doit s’appliquer mondialement, sinon les transactions concernées vont simplement se déplacer vers les pays qui n’en appliquent pas", explique un porte-parole du ministère des Finances britannique.
De leurs côtés, Stockholm et Madrid ont déjà pointé du doigt des "difficultés d’application" et un risque de "baisse des recettes fiscales". "Une idée intéressante", estime pour sa part la Finlande. A peine formulée, la proposition de Nicolas Sarkozy et Angela Merkel se transforme déjà en casse-tête diplomatique. L’Union européenne s’y est déjà d’ailleurs cassée les dents plusieurs fois. Y compris lors d’un sommet européen le mois dernier. Au niveau mondial, malgré la pression française, le G20 a déjà retoqué l’idée l’an dernier à Toronto.
Qui va payer ?
La taxe sur les transactions financières, c’est l’épouvantail des marchés et des banques européens. Peur numéro 1 : la "délocalisation " des transactions hors de l’Europe. "Une telle taxe serait un cadeau aux places financières et produits financiers non régulés ", s’alarme le groupe Deutsche Börse. La fédération allemande des banques estime par ailleurs qu’une taxe ne parviendra pas à stabiliser les marchés européens et ne produira pas de recettes importantes. Si Paris et Berlin s’alignent sur la proposition de la Commission européenne dans son budget prévisionnel 2014-2020 (0,1 % des actions et obligations et de 0,01% pour les produits dérivés), cela générerait tout de même entre 31,5 et 54 milliards d’euros, selon les calculs de Bruxelles. Sauf que la banque suisse UBS estime que "cela multiplierait par 10 ou 20 les coûts des transactions".
La France et l’Allemagne ont donc désormais deux petites semaines pour trouver la bonne formule : convaincre les pays européens et rassurer les marchés.