Un Français condamné à la perpétuité en Irak pour appartenance à Daech

Ils risquaient la peine de mort. Deux Européens ont été condamnés ce lundi à Bagdad à la perpétuité. En Irak, cette peine équivaut en réalité à vingt années de prison. C’est une sentence qui est régulièrement infligée aux Occidentaux ayant rejoint le groupe État islamique (EI), qui avait plongé en 2014 le pays dans le chaos.

Parmi les deux individus jugés, le Français Lahcen Gueboudj, 58 ans, et une Allemande, Nadia. Ils ont tous les deux été condamnés par la cour pénale centrale de Bagdad, chargée des affaires de terrorisme. Durant la matinée, une quinzaine d’accusés, tous Irakiens en dehors des deux Européens, ont aussi été présentés à la cour pour entendre leur sentence, en majorité pour des affaires relevant de la loi antiterrorisme. L’un d’entre eux, un Irakien, a, lui, été condamné à la mort par pendaison.

Lahcen Gueboudj dément appartenir à l’EI

Lahcen Gueboudj, cheveux blancs coupés courts, barbe de quelques jours et uniforme marron des prisonniers, a répondu durant une demi-heure aux questions du juge, selon une journaliste de l’Agence France-Presse présente à l’audience. Il a d’emblée démenti toutes ses déclarations obtenues lors d’interrogatoires et citées par le juge, affirmant avoir « signé des aveux en arabe sans savoir ce qui était écrit ». L’homme, qui s’exprimait en français avec un accent du sud de la France, a expliqué être parti avec sa femme et ses enfants en Turquie, puis en Syrie.

« Je n’aurai jamais quitté la France si mon fils aîné Nabil, 25 ans, n’avait pas rejoint la Syrie, a-t-il plaidé. Je voulais le convaincre de rentrer avec nous en France. » Il a nié avoir prêté allégeance à l’EI ou avoir suivi des entraînements dirigés par ce groupe ultraradical, comme l’indiquaient ses aveux à l’issue de deux interrogatoires en mars et en avril.

Déjà condamné à un an de prison

Il s’est présenté comme « un civil à Raqqa puis durant sept mois à Mayadine », deux importants bastions de l’EI en Syrie, dont les djihadistes ont aujourd’hui été chassés. Le juge lui a montré une photo de lui portant une longue barbe blanche au moment de son arrestation. Il a dit se reconnaître, sans toutefois pouvoir préciser le lieu de son arrestation.

Il a affirmé n’avoir jamais rejoint l’Irak mais avoir été arrêté par l’Armée syrienne libre (ASL, rebelles) après s’être « perdu près d’un village » en Syrie puis avoir été ensuite emmené par des membres des forces américaines en Irak. Fin juillet, le même tribunal l’avait déjà condamné à un an de prison pour « entrée illégale » en Irak.

Mineure au moment des faits

À la question « êtes-vous coupable ou innocent ? », Lahcen Gueboudj a répondu : « Je suis coupable d’être allé en Syrie, c’est tout. » Son avocat commis d’office s’est ensuite borné à répéter ses propos dans sa très rapide plaidoirie. Nadia, teint pâle mais l’air déterminé, a de son côté raconté en allemand émaillé de mots d’arabe être venue en Turquie avant de passer en Syrie puis en Irak avec sa sœur (handicapée mentale et morte dans un bombardement), sa mère et sa fille Yamama.

Son avocat a plaidé qu’elle était mineure au moment des faits et que son mariage avec un djihadiste relevait du « viol commis par un groupe armé et non d’une décision prise par un adulte en toute conscience ». Répudiée par son mari membre de l’EI en Syrie, la jeune femme, voile noir et blanc sur la tête, abaya noire et lunette aux montures de la même couleur, a affirmé être ensuite partie vers l’Irak avec sa mère et sa fille « pour fuir les gens de l’EI ».

Une centaine d’étrangers jugés pour avoir rejoint Daech

Sa mère, Lamia K., arrêtée avec Nadia en juillet 2017 à Mossoul dans le nord de l’Irak, avait écopé en janvier 2018 de la peine de mort, sentence ensuite commuée en réclusion à perpétuité. Nadia, comme Lahcen Gueboudj, a trente jours pour faire appel. La loi irakienne prévoit la peine capitale pour toute personne ayant rejoint un « groupe terroriste », qu’elle ait combattu ou non dans ses rangs.

En tout, selon des sources judiciaires, plus de 300 personnes, dont une centaine de ressortissantes étrangères, ont été condamnées à mort ou à la prison à vie en Irak pour avoir rejoint l’EI. En mai, un Belge, Tarik Jadaoun, avait ainsi été condamné à mort.

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