Scandale des « lasagnes au cheval »: jugement mardi dans l’affaire Spanghero

Y a-t-il eu entente frauduleuse entre l’entreprise française Spanghero et un négociant néerlandais pour écouler de la viande de cheval pour du boeuf ? Le tribunal correctionnel de Paris rend mardi son jugement dans le volet le plus retentissant du scandale international des « lasagnes au cheval ».

Lors du procès qui s’est déroulé en janvier et février, le parquet avait requis de la prison ferme contre les deux principaux prévenus, dénonçant une fraude aux "effets catastrophiques", "organisée de concert" entre les Pays-Bas et la France.

Dans cette affaire, "l’une des plus importantes fraudes alimentaires de ces dernières années", "la traçabilité a été méticuleusement torpillée" dans des entrepôts néerlandais puis en Occitanie chez Spanghero, avait fustigé la procureure.

Le scandale, qui n’avait eu aucune conséquence sanitaire, avait éclaté au Royaume-Uni début 2013 et s’était propagé à toute l’Europe.

Des marques comme Findus et Picard avaient découvert que les lasagnes et autres plats préparés "pur boeuf" qu’ils commercialisaient contenaient en fait, pour des milliers d’entre eux, du cheval.

Ce volet Spanghero jugé à Paris est le plus retentissant de cette fraude.

Deux anciens responsables de cette société et deux négociants néerlandais en viandes sont poursuivis pour escroquerie en bande organisée et tromperies, soupçonnés notamment d’avoir vendu entre 2012 et 2013 au fabricant de plats préparés Tavola plus de 500 tonnes de cheval comme étant du boeuf.

Aux yeux du parquet, ces deux binômes de "professionnels de la viande" "ont organisé de concert" la fraude.

Selon le scénario déroulé par l’accusation, le négociant en viandes Johannes Fasen achetait du cheval roumain ou canadien, ensuite dépouillé de ses étiquettes dans les frigos néerlandais de son bras droit Hendricus Windmeijer.

Cette viande partait pour l’ex-entreprise Spanghero à Castelnaudary (Aude), sans mention explicite de l’espèce chevaline ou de la provenance canadienne – synonyme de cheval – d’une partie de la marchandise.

Chez Spanghero, le directeur général Jacques Poujol et le patron de l’usine Patrice Monguillon "brouillaient encore plus la traçabilité", selon la procureure, en apposant des étiquettes laissant croire que la viande était transformée sur place. Elle était enfin réexpédiée à Tavola, au Luxembourg, étiquetée comme du boeuf.

Jacques Poujol et Johannes Fasen avaient un intérêt financier "tout particulier" dans ces manoeuvres, affirme le parquet, celles-ci permettant à M. Fasen, spécialiste du cheval, d’en "écouler de grandes quantités" en Europe de l’Ouest, et à M. Poujol de le vendre au prix du boeuf, plus cher.

Contre Johannes Fasen, "grand organisateur de la fraude", la procureure a requis quatre ans de prison avec mandat d’arrêt. Le sulfureux Néerlandais, déjà condamné aux Pays-Bas dans une affaire similaire avec M. Windmeijer, est menacé par deux autres affaires portant également sur de la viande de cheval.

La magistrate a demandé trois ans de prison, dont deux avec sursis, contre Jacques Poujol, ainsi que la confiscation de plus de 870.000 euros saisis et son interdiction définitive d’exercer dans la viande en France, comme pour Johannes Fasen.

Dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis ont été requis contre M. Windmeijer et deux ans avec sursis et 10.000 euros d’amende contre M. Monguillon.

Jacques Poujol et Johannes Fasen réfutent chacun les accusations et se renvoient la faute, ne s’accordant que sur un point: il n’existe pas d’escroquerie "en bande organisée".

M. Fasen et les deux ex-dirigeants de Spanghero sont aussi poursuivis pour l’importation de 65 tonnes de viande de mouton séparée mécaniquement, méthode interdite depuis la crise de la vache folle. Et les Français pour avoir détruit ou altéré un certain nombre de preuves.

L’affaire avait causé une grave crise de confiance chez les consommateurs: la répression des fraudes a observé "une baisse de 40 à 45% en volume pour le secteur des plats cuisinés" pour la seule première année.

Elle eu raison du fabricant Tavola et avait précipité la perte de Spanghero.

Au total, les parties civiles – fabricants ou distributeurs de plats préparés, représentants de la filière viande, liquidateurs et associations de consommateurs – réclament 40 millions d’euros aux prévenus.

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