« C’est maintenant » : Quand François Hollande plagie le slogan de Chirac en 1981
Le slogan de campagne retenu par l’équipe Hollande est celui utilisé par… Jacques Chirac en 1981. Couac ou hommage ?
Pour ce qui est de l’originalité, on s’interroge. Le "C’est maintenant" hollandais 2012, que l’on s’autorise, d’un point de vue personnel à juger banal, convenu, passe-partout, guère porteur d’une promesse, surtout après quatre ans de sarkozysme, ne semble guère promis à la postérité au même titre que "La force tranquille" 1981, "La France unie" 1988, le "Giscard à la barre" de 1974 et même le "Ensemble tout devient possible" 2007 de Sarkozy, sans parler du "Yes, we can" d’Obama 2008. Et pire encore, ce slogan fait écho à un autre slogan, utilisé dans une autre campagne présidentielle, en 1981.
Tradition française oblige, tout commence par une chanson. C’est la réminiscence du refrain obsédant et entêtant d’un vieux tube de l’histoire des chansons politiques qui nous a mis sur la voix, donc la voie. Le "maintenant" nous semblait déjà associé à la vie politique électorale française. C’est donc en mode Madeleine de Proust, par association d’idées et de mots, que la lumière mémorielle jaillit.
"Maintenant", c’était le titre de la chanson de campagne d’un des principaux candidats à l’élection présidentielle de 1981, et c’était aussi le slogan majeur de sa campagne.
Ce candidat était celui du RPR, Jacques Chirac.
"Jacques Chirac, maintenant".
"Pour tous Jacques Chirac
Maintenant Président
Ensemble maintenant
Jacques Chirac Président"
C’est "Maintenant" disait donc déjà en 1981 Jacques Chirac à ses électeurs tandis qu’il était ferraillait contre un Président de la République sortant. Il ne le disait pas seulement en chanson, mais aussi sur affiche :
Hier sur France Inter, l’éditorialiste politiqueThomas Legrand invitait François Hollande a faire moins dans la contrefaçon Mitterrand. A-t-il été entendu, déjà ? En partie puisque le slogan de campagne de François Hollande, imaginée par l’agence BDDP & Fils, dirigée par François Blachère, emprunte, voire plagie (involontairement sans doute) le slogan Chirac 1981. On est loin de la référence à Mendès souhaitée par la plume d’Inter.
Il est dommage que le François Hollande et le PS, avec ce slogan un peu plat et convenu, incertain et vague, déjà vu et utilisé, se prive dans la campagne électorale d’une arme de communication massive, emblématique du changement proposé. Ce n’est pas tout de dire "C’est maintenant" et "Le changement, c’est maintenant", encore faut-il signifier pourquoi et en quoi. "La Force tranquille" ou "La France unie", simples et efficaces, avaient le mérite de tout dire en deux mots.
On notera également, que le slogan est construit en trois temps. Là où Mitterrand était instantanément associé au slogan, incarnant la "Force tranquille" ou la France unie", il faut que l’électeur confronté au slogan hollandais établisse un syllogisme : "le changement, c’est maintenant, donc le changement c’est Hollande, donc c’est Hollande maintenant"… Le "c’est", démonstratif, indique finalement et paradoxalement que le syllogisme ne s’impose pas naturellement. Si le changement va de soi, pourquoi le dire ? Mieux vaudrait lancer un message sur le contenu de ce changement, non ?
S’il y a une leçon à tirer de cette anecdote, c’est que la communication politique, c’est un métier qui exige de l’imagination réelle, du sens politique, le goût de l’Histoire et… de la mémoire.