Dans son livre "Omerta dans la police » qui paraît ce jeudi 14 octobre aux édition Cherche midi, cette fonctionnaire de la police dénonce le racisme et les discriminations au sein du PAF de l’aéroport d’Orly (sud de Paris), où elle a travaillé pendant plus de trois ans. I
Sihem Souid a longtemps gardé le silence. Rattrapée par sa conscience, elle s’est décidée à dénoncer les faits dont elle a été témoin. « C’est le fait d’une minorité qui salit la majorité mais, si personne ne se bat, on va droit au mur, souligne la fonctionnaire de police d’origine tunisienne. La France a mal à sa police. J’ai peur pour notre pays, j’ai peur pour la France. On a franchi la ligne blanche. Le pays des droits de l’homme… On ne peut pas accepter ça ! », dit-elle.
Les révélations de Sihem Souid pourraient lui coûter son travail et peut-être plus : l’ancien contrôleur général de la PAF, Alain Bianchi, fortement mis en cause dans l’ouvrage, se réserve le droit de la poursuivre.
L’éditeur de Mme Souid s’est entouré d’un luxe de précautions afin d’éviter les fuites. Il affirme même craindre une saisie. Celle-ci n’est pas à l’ordre du jour, a répondu à l’AFP la direction générale de la police nationale. Le livre est une longue série de graves accusations contre une « minorité » de policiers, chargés du contrôle de l’immigration à la PAF. L’ouvrage fourmille d’exemples dont l’auteur dit détenir les « preuves », mais non publiées en annexes comme prévu initialement.
Sihem Souid, entrée « par vocation » dans la police, s’est retrouvée ADS (anciens emplois jeunes de la police) à la PAF d’Orly -300 policiers sur plus de 7.000 en France – après un passage comme cadre à la Brink’s (transports de fonds). Mais la jeune femme déchante vite, confrontée, accuse-t-elle, à des cas de sexisme, maltraitance d’immigrés, homophobie, passe-droits de la hiérarchie, course effrénée aux chiffres.
« Le langage courant de la PAF, c’est "Je vais contrôler les bougnoules" ou "Tiens, voilà encore un avion de nègres" », écrit-elle. Elle cite le cas d’une femme venant de Brazzaville (Congo) interpellée car
soupçonnée de clandestinité. Son mari est « victime de violences », elle se retrouve nue dans une cellule au vu de tous, filmée par un policier avec un portable. Il y a dix expulsions illégales par semaine à Orly, affirme-t-elle, ajoutant que les victimes de « comportements discriminatoires » sont monnaie courante à la PAF d’Orly.
Mme Souid avait pris la tête d’une fronde judiciaire avec six collègues et porté plainte en 2008, notamment pour discrimination. Plainte classée sans suite en 2009. Sihem Souid affirme avoir porté plainte devant un juge d’instruction et saisi la Haute autorité de lutte contre les discriminations, où son cas susciterait des « réserves », selon des sources proches de cette institution. Une « décision a été prise et va être notifiée aux parties », a simplement déclaré la Halde.