Au Maroc, les deux chambres du parlement se livrent bataille à cause du sucre

Narjis Rerhaye (A Rabat)

C’est une guerre contre le sucre qui se joue dans les grands couloirs aux rideaux rouges du parlement marocain. Il y a quelques semaines, les députés de la chambre basse ont apporté un amendement au projet de loi de finances 2019.

« C’est un amendement qui pour une fois a mis d’accord opposition et majorité. Il concerne l’augmentation de la taxe intérieure de consommation, TIC, sur les boissons non gazeuses sucrées. Ce qui signifiait en clair que les fabricants de ces boissons ne vont plus pouvoir bénéficier de la ristourne sur le sucre de 50% que la Caisse de compensation leur versait dans le cadre du soutien aux produits de base comme le sucre », explique un député de la majorité.

Invités à examiner en seconde lecture le projet de loi de finances, les Conseillers ne l’entendent pas vraiment de cette oreille. Une majorité d’entre eux, voudrait tout bonnement et sans autre forme de procès supprimer la taxe « sucre » imposée aux limonadiers par les députés. Pour ce fervent défenseur des droits des consommateurs « les lobbies ont probablement bien fonctionné ! »

Applaudi pourtant des deux mains, l’amendement en question introduit par la chambre basse et adopté en première lecture a placé la question de la santé des citoyens –et en particulier les enfants- au cœur des préoccupations du pouvoir législatif. Les députés marocains le disent haut et fort. L’objectif d’un tel amendement est de lutter contre les maladies liées à la consommation de sucre. Des études sont brandies, comme celle du cabinet Mc Kinsey qui estime le coût de l’obésité à 24 milliards de DH.

Des chiffres alarmants sont révélés. Comme ceux du Haut Commissariat au Plan indiquant que le tiers de la population marocaine est obèse. Autre problème de santé publique lié souvent à la consommation du sucre, le nombre de diabétiques n’en finit pas d’augmenter au Maroc, atteignant la barre des 2,5 millions de personnes. Les répercussions des maladies chroniques directement liées au sucre sur les deux caisses de la santé, CNSS et CNOPS et qui engloutiraient, selon les déclarations des élus de la nation 50% de leur budget.

Rien n’est encore joué. La suppression de la taxe « sucre » par la chambre haute ne signifie pas pour autant que la guerre contre le sucre est perdue. Selon la constitution marocaine, le gouvernement peut brandir l’article 77 et rejeter tout amendement du projet de loi de finances. Le cas échéant, la loi de finances sera de nouveau examinée en troisième lecture par les députés qui auront, eux, le dernier mot.

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