Burkina: des « appétits voraces » ralentissent la formation du gouvernement
Des « appétits voraces » ralentissent la formation du gouvernement, attendu d’ici samedi pour conduire le pays jusqu’à la fin de la transition politique en novembre 2015, a critiqué jeudi un militaire proche du Premier ministre Isaac Zida.
« Ca n’avance pas, ça recule », a pesté cet officier, l’un des plus proches collaborateurs de M. Zida, en dénonçant les « appétits voraces » des civils, divisés entre opposition et société civile, qui retardent le processus de transition.
La société civile "nous a pris en otage" jeudi matin pour les postes de ministre qui lui sont alloués, a dénoncé cet officier. "Ils n’arrivent pas à s’entendre pour désigner leurs représentants. Nous pensions que c’étaient des gens sérieux. Mais ils nous ont amené des CV qui ne sont pas consistants".
"Etre membre du gouvernement n’est pas égal au volume de gaz lacrymogène respiré ou à la distance parcourue", s’est-il irrité, en référence aux manifestations qui avaient abouti à la chute du président Blaise Compaoré le 31 octobre.
Les partis politiques d’opposition, autre composante majeure du gouvernement, sont de leur côté "en ordre de bataille" et posent donc moins de problème, a poursuivi ce militaire.
Le gouvernement comportera 25 ministres. Parmi eux, 14 seront issus de l’opposition et de la société civile: "huit à neuf" issus des partis politiques d’opposition à M. Compaoré, et "cinq à six" de la société civile, a détaillé l’officier.
Il siègera jusqu’à la fin de la période de transition, bouclée par des élections présidentielle et législatives en novembre 2015.
Le président et le Premier ministre attribueront les 11 portefeuilles restants, a précisé le même proche du lieutenant-colonel Zida, qui avait pris les rênes du pays à la chute de l’ancien régime avant d’être nommé Premier ministre.
"Il y aura trois à cinq militaires dans le gouvernement au maximum, en plus du Premier ministre. Le reste, ce seront des civils parce que nous aurons également des civils" pour représenter l’armée, a expliqué l’officier.
La société civile a plus de mal encore à s’entendre au sujet des 25 membres qu’elle enverra au CNT, qui compte au total 90 sièges.
Mardi, elle a frôlé la bataille rangée au Centre de presse Norbert Zongo de Ouagadougou, où plus d’un millier de personnes étaient accourues pour faire acte de candidature.
"Si on donnait même 100 places à la société civile, on ne pourrait pas s’en sortir", s’est lamenté Issaka Hermann Traoré, membre du bureau de la Coordination des organisations de la société civile.
Les très nombreux partis politiques d’opposition n’ont pas échappé à cette cacophonie. Après deux jours d’intenses tractations et mésententes, ils se sont finalement entendus sur le principe d’"un parti, un représentant" au CNT, où l’opposition disposera de 30 sièges, a indiqué à l’AFP El Hadj Mamadou Kabré, lui-même leader d’un petit parti.
Selon un officier, aucune difficulté en revanche ne secouait l’armée (25 sièges), "discipline" oblige.
Les autres parties, notamment les formations de l’ancienne majorité pro-Compaoré, se partageront les dix sièges restants.
Le président intérimaire Michel Kafando a été désigné mardi et Isaac Zida nommé mercredi au poste de chef de gouvernement.
Lors d’une cérémonie vendredi, le lieutenant-colonel Zida, qui exerçait les fonctions de chef de l’Etat depuis la chute de M. Compaoré, doit passer symboliquement les pouvoirs au président Kafando.
Le gouvernement doit être annoncé d’ici samedi.