Dans le cas de François Fillon à Argenteuil, cela fleure bon la grande stratégie de communication politique. A quelques jours d’un débat passionné sur l’interdiction de la Burqa en France, réduit par beaucoup et souvent à tort, à une stigmatisation de l’identité et de la pratique des musulmans de France, les stratèges de François Fillon ont dû se gratter le crâne jusqu’à des rougeurs visibles pour trouver une action d’éclat qui envoie un message d’estime et de valorisation pour les musulmans de France. Et qu’y a-t-il de plus rassurant que d’inaugurer une grande mosquée en présence des grandes notabilités de l’Islam de France. Le geste est fort, surtout pour une religion, la deuxième en France, dont la présence même sur le sol français et sournoisement remise en cause et qui continue à se pratiquer dans des caves sauvages ou des garages désaffectés.
François Fillon, chef de gouvernement, a tenu à inaugurer personnellement cette mosquée avec la volonté explicite de prendre les choses en main. Mais l’a-t-il fait de manière volontaire ou contrainte, dans la mesure où de pareilles activités sont en général du domaine du ministère de l’intérieur et du culte, fonction occupée actuellement par Brice Hortefeux ? Même si ce dernier fait partie de la délégation qui a inauguré la mosquée d’Argenteuil, il aurait été difficile, limite cocasse, de le voie seul au commandes d’une telle opération. Brice Hortefeux se distingue actuellement dans l’histoire des ministres de l’intérieur, d’être le seul à avoir été condamné par la justice pour « injures raciales » suites à ses confidences politiquement incorrectes sur le seuil des arabes et « des auvergnats » à supporter sur les territoires de la république.
L’inauguration de la Mosquée d’Argenteuil, « la plus grande mosquée d’Europe par sa superficie » selon son gérant Abdelkader Achebouche, intervient alors que les braises du débat sur l’identité nationale animé par le ministre de l’immigration et de l’identité nationale Eric Besson, sont toujours vivaces. Ce débat, lancé à la base pour construire une réflexion sur qu’ « être Français aujourd’hui » avait été organisé dans la précipitation et l’amateurisme et a fini par libérer une dangereuse parole raciste et xénophobe qui menace l’ensemble du vivre ensemble républicain. La démarche de François Fillon vise, dans ce contexte de suspicion généralisé, à recréer un lien de confiance entre une communauté musulmane française qui vit sa foi sur le fils du rasoir et une république tentée et travaillée opportunément par les démons de l’intolérance et de l’exclusion.