Trois semaines après le début des troubles, mardi 11 janvier, la France est prudemment sortie de son silence, la ministre des affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, soulignant que "la priorité" devait "aller à l’apaisement après des affrontements qui ont fait des morts". Mais la ministre s’est aussitôt empressée d’ajouter que Paris refusait de se poser en "donneur de leçons".
Une timidité que n’a pas manqué de critiquer le Parti socialiste, qui regrette dans un communiqué "le silence pesant des autorités françaises". Il faut "que ce gouvernement se ressaisisse et s’exprime de manière forte, à la fois pour condamner les violences et pour apporter sa contribution à un processus de réforme indispensable", a estimé mardi le député socialiste Gaëtan Gorce.
Face aux attaques de l’opposition, le porte-parole du gouvernement, François Baroin, a qualifié d’"équilibrée" la position de Paris face aux événements qui agitent la Tunisie depuis le 17 décembre.
"Déplorer les violences, appeler à l’apaisement, faire part de ses préoccupations, c’est une position équilibrée que défend aujourd’hui la France au regard de la situation tunisienne", a-t-il déclaré. "Je rappelle que la Tunisie est un ancien protectorat français. Compte tenu de nos liens d’amitié et compte tenu de notre histoire commune, aller plus loin serait faire preuve d’une ingérence qui n’est pas du tout la ligne de la diplomatie française en la matière", a-t-il ajouté.
Après les Etats-Unis, qui ont fait part mardi de leur préoccupation face à un "usage excessif de la force" envers les manifestants, la diplomatie européenne a à son tour condamné mercredi l’usage "disproportionné" de la force par la police.
"Cette violence est inacceptable, les auteurs doivent être identifiés et traduits en justice", a déclaré Maja Kocijancik, la porte-parole de la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton "Nous sommes inquiets du recours à la force disproportionné de la police envers les manifestants pacifiques", a-t-elle ajouté, précisant que l’UE demandait une enquête à ce sujet.
Le premier ministre tunisien, Mohamed Ghannouchi, a annoncé mercredi à Tunis le limogeage du ministre de l’intérieur, Rafik Belhaj Kacem, et la libération de toutes les personnes arrêtées dans le cadre des émeutes sociales qui secouent le pays depuis quatre semaines. Il a également annoncé, au cours d’une conférence de presse, la formation d’une commission d’enquête sur la corruption que dénoncent opposition et ONG.
La crise a pris un tour dramatique ce week-end avec des affrontements violents dans des villes du centre. Le mouvement a débuté le 17 décembre après l’immolation par le feu d’un jeune marchand de rue de Sidi Bouzid, dans le centre-ouest, à 265 km de Tunis, qui protestait contre la saisie de sa marchandise par la police. Il a gagné mardi soir une banlieue de Tunis.