France: la régie publicitaire de la RATP refuse une campagne d’affichage contre l’islamophobie

France: la régie publicitaire de la RATP refuse une campagne d’affichage contre l’islamophobie
Début novembre, le Collectif contre l’Islamophobie en France (CCIF) a lancé la campagne “Nous sommes la Nation” avec pour objectif d’abattre les clichés sur les musulmans ancrés dans la société française. Le projet se décline sous forme de spots radios (diffusés sur Beur FM et Europe 1 mais aussi, et surtout, sous la forme de trois affiches qui représentent, entre autres, un couple non maghrébin mais musulman, et une relecture du Serment du Jeu de Paume de David dans laquelle quelques voiles se sont glissés dans la foule.

La campagne choc n’a pas plu à tout le monde. Le CCIF a rendu publique hier une lettre de Gérard Unger, président et directeur général de Metrobus, la régie publicitaire de la RATP, dans laquelle il explique les raisons qui l’ont conduit à refuser d’afficher la campagne du CCIF dans le métro. “L’identité de l’annonceur et l’examen de ces trois visuels nous ont conduits à considérer qu’ils revêtaient un caractère politique et confessionnel, contraires aux dispositions du contrat par lequel la RATP nous a confié l’exploitation publicitaire de ses espaces“, argumente-t-il. Il avance également : “Le caractère confessionnel des visuels ne peut être contesté en ce que les trois visuels utilisent des signes religieux tels que le voile (…). De même, et de surcroît dans le contexte actuel que nous sommes tenus de prendre en considération, le slogan “Nous sommes la Nation” et l’utilisation d’un emblème de la nation française qu’est le drapeau français relèvent du politique et d’une revendication politique.”

Stupeur et tremblement

Mais Marwan Muhammad, porte-parole du CCIF, a été surpris par le refus de Metrobus. En effet, d’après lui, les négociations avec la régie publicitaire étaient très avancées. “On nous a dit que l’autorité de la régulation de la publicité était en train de valider le visuel“, nous explique-t-il au téléphone. Et puis, plus rien. Ou plutôt un refus, non argumenté. “On a du insister pour obtenir une justification” assure Marwan Muhammad, qui juge irrecevables les arguments avancés par Metrobus : “Leur lettre est traversée de clichés. Montrer les musulmans sur une affiche pour Gerard Unger c’est un geste religieux, comme si la lutte contre l’antisémitisme était par exemple le seul fait des rabbins ! Le CCIF est une organisation non religieuse et non politique. Le fait qu’il identifie cette campagne comme un geste politique et religieux, ça montre que notre société est traversée par les préjugés.”

Ce n’est pas le seul obstacle que l’organisation a du surmonter. Lorsqu’il cherchait une salle à louer pour organiser sa conférence de presse, le CCIF s’est heurté à un manque de bonne volonté .

“Dès qu’ils entendaient le nom de famille à consonance arabe de la personne qui voulait louer la salle ou l’objet de la campagne, les salles se retrouvaient soudain bookées pour six mois ou avaient une fuite d’eau, ou des travaux à mener d’urgence”.

L’organisation n’envisage pas de recours juridique puisque l’annonceur a le choix des campagnes qu’il souhaite diffuser ou non. Pour se venger, le CCIF a donc décidé de rendre publique la lettre de Metrobus. Un moyen, aussi, de “demander à la RATP d’assumer ses positions idéologiques”. “Il n’y a pas de problème pour eux à exposer des unes du Point mais nos affiches nous sont interdites !” ajoute-t-il, “pour eux, les musulmans n’ont pas le droit de répondre aux insultes“.

Malgré tout, la campagne est toujours vivante et s’affiche sur les panneaux J.C Decaux aux abords du périphérique parisien et en région lyonnaise. Elle devrait se poursuivre jusqu’à la fin du mois de novembre.

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