Un gouvernement d’union formé en Libye, incertitude sur son approbation
Après des semaines de confusion, un gouvernement d’union nationale a finalement été annoncé en Libye mais son approbation reste très incertaine par le Parlement internationalement reconnu qui se réunit lundi.
Les députés devaient se réunir dans l’après-midi pour accorder ou non leur confiance au gouvernement qui comprend 18 membres dont cinq ministres d’Etat.
Ils "se dirigent" vers le Parlement "et les préparatifs ont lieu comme prévu. La séance de vote aura lieu aujourd’hui", a indiqué à l’AFP Ali Tekbali, un député.
Quelques heures plus tôt, vers minuit, la liste avait été dévoilée par le Conseil présidentiel, composé de neuf membres de factions rivales libyennes et dirigé par le Premier ministre désigné, Fayez al-Sarraj. Ces responsables étaient réunis depuis plusieurs jours à Skhirat au Maroc où se tiennent les négociations sous l’égide de l’ONU.
"Nous espérons que ce gouvernement représentera le début de la fin du conflit en Libye", a déclaré le porte-parole du Conseil présidentiel, Fathi al-Mejebri.
L’annonce est intervenue quelques minutes seulement avant l’expiration du délai accordé par le Parlement reconnu pour la présentation du nouveau gouvernement. Une première liste qui comptait 32 membres avait été rejetée le 25 janvier parce que le nombre de ses membres était jugé trop élevé.
– De nombreux défis –
L’installation d’un gouvernement d’union à Tripoli est espérée avec force par la communauté internationale, de plus en plus préoccupée par l’absence d’un pouvoir central en Libye.
Cette instabilité a favorisé l’implantation du groupe jihadiste Etat islamique (EI), qui contrôle la ville portuaire de Syrte et ses environs. Elle rend aussi plus difficile la lutte pour freiner le départ de milliers de migrants des côtes libyennes vers l’Europe.
"J’espère que la Libye pourra avoir un gouvernement pleinement opérationnel très prochainement", a déclaré lundi la chef de la diplomatie de l’UE, Federica Mogherini. "Cela serait un immense pas en avant en vue d’une pacification du conflit politique et un moyen de rétablir l’Etat", a renchéri le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier.
Les Européens se sont déclarés prêts à aider la Libye, une fois dotée d’un gouvernement d’unité, à faire redécoller une économie quasiment à l’arrêt et à lutter militairement contre l’EI, éventuellement par une campagne de frappes aériennes comme en Syrie ou en Irak.
Le pays est livré à des groupes politiques et armés rivaux depuis que Mouammar Kadhafi a été renversé et tué en 2011 à la suite d’une rébellion soutenue par une intervention militaire occidentale menée par la France, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis.
– Députés ‘mécontents’ –
Deux autorités principales se disputent le pouvoir: un gouvernement reconnu par la communauté internationale installé dans l’est, et un autre basé à Tripoli, sous le contrôle d’une coalition de milices, en partie islamistes.
Les deux Parlements rivaux avaient signé mi-janvier un accord parrainé par l’ONU. Mais les négociations pour la formation d’un gouvernement d’unité ont été très compliquées, notamment pour l’attribution du portefeuille de la Défense, qui a finalement été accordé à Al-Mahdi al-Barghathi, un colonel des forces armées loyales aux autorités reconnues internationalement.
Deux membre du Conseil ont cependant refusé de signer le document scellant le nouveau gouvernement. L’un d’eux, Ali al-Gatrani, conteste la nomination du colonel Barghathi, perçu comme un rival du controversé général Khalifa Haftar, homme fort des autorités de l’Est, dont il est proche.
Par ailleurs, une partie des députés "sont mécontents" de la méthode suivie par le Conseil présidentiel et M. Sarraj pour former le gouvernement, selon le député Khalifa al-Deghari. "Les noms des ministres nous ont été envoyés par courrier électronique à minuit et on nous demande de voter le lendemain. Ne sommes-nous pas dans notre droit de demander qui sont-ils? Et qu’ont-ils apporté?", a-t-il expliqué.
L’ordre du jour de la séance parlementaire comprend aussi un vote sur l’inclusion de l’accord politique conclu en décembre à Skhirat dans la Constitution de 2011. Mais ce processus s’annonce "difficile car il nécessite l’approbation de deux tiers des membres", selon M. al-Deghari.