Dominique d Villepin a-t-il cédé aux sirènes du régime algérien ?

L’ancien Premier ministre français de Jacques Chirac, Dominique de Villepin, a surpris par un changement notable de ton. Son discours s’aligne désormais sur les éléments de langage officiels d’Alger et semble céder aux sirènes du régime algérien.

L’analyse des facteurs profonds de la crise entre Alger et Paris fait ressortir une raison essentielle, fondatrice, incontournable. C’est la reconnaissance française de la marocanité du Sahara atlantique qui est derrière la mauvaise humeur et les comportements perchés algériens. Toutes les autres causes apparentes de cette tension, Boualem Sansal, le refus des OQTF, les influenceurs algériens, l’expulsion des diplomates… ne sont en réalité que la conséquence indirecte, les dommages collatéraux de ce tournant français. Une impression se dégage: Alger semble reprocher à Paris son rapprochement avec la vision défendue par le Maroc

Et cette rivalité ne se limite ni aux autorités françaises ni à leur position diplomatique. Elle s’étend également au champ partisan, où elle alimente des lignes de fracture de plus en plus visibles. Latente mais bien réelle, la compétition entre Rabat et Alger trouve un écho dans les débats politiques français, opposant d’un côté ceux qui soutiennent la vision marocaine, et de l’autre, ceux qui reprennent, parfois sans distance, les éléments de langage issus de la rhétorique algérienne.

Du côté marocain, les partis de la droite traditionnelle et nationale, tout comme ceux de la gauche dite «de gouvernement» incarnée par le Parti socialiste, soutiennent la démarche de Rabat. Ils ont accueilli favorablement les choix officiels de l’État français, notamment lorsque Emmanuel Macron a opté pour une clarification stratégique de la position de la France.

En revanche, deux formations politiques — La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon et le Parti communiste français dirigé par Fabien Roussel — se distinguent régulièrement par des prises de position alignées sur la lecture algérienne de la question.

La France insoumise s’est à ce point investie dans la défense du régime algérien et de ses positions que ses détracteurs n’hésitent plus à l’accuser de s’être muée en véritable force de lobbying au service d’Alger, aussi bien à Paris qu’à Bruxelles.

Un épisode récent en a fourni une illustration claire: lors du vote d’une résolution au Parlement européen appelant à la libération de l’écrivain Boualem Sansal, les députés de La France insoumise ont refusé de la soutenir. Une attitude qui révèle les limites de leur capacité — ou de leur volonté — à critiquer ouvertement le régime algérien.

Récemment encore, Mathilde Panot, l’une des figures de proue de La France insoumise, a refusé de qualifier le régime algérien de «dictature», alors même que certains de ses partisans les plus convaincus reconnaissent la nature militaire du régime.

Quant à sa collègue, l’iconique Rima Hassan, elle évoque l’Algérie avec une admiration manifeste, allant jusqu’à en faire une sorte d’idéal politique, un «paradis» voire même une «Mecque de la liberté».

La récente mésaventure médiatique du député LFI Sébastien Delogu, en visite à Alger, a suscité un large retentissement. Ses déclarations panégyriques du régime algérien ont dévoilé la vraie face de la France insoumise, soumise en réalité aux injonctions du régime algérien.

L’épisode Delogu, marqué par des déclarations jugées déconnectées du contexte, a contraint la direction de La France insoumise à prendre ses distances. Une manière de contenir la polémique et d’éviter d’alimenter davantage les soupçons persistants qui pèsent sur le parti, accusé de relayer ouvertement les positions du régime algérien et de contribuer à son agenda politique et médiatique.

«C’est ainsi que le Maghreb, et plus particulièrement la rivalité entre le Maroc et l’Algérie, se sont imposés comme un véritable enjeu de politique intérieure en France, influençant les prises de position et les engagements de nombreux responsables politiques.»  Mais cette prise de distance n’a en rien atténué les critiques. Au contraire, elle a ravivé l’accusation selon laquelle LFI agirait comme un véritable porte-voix de la propagande algérienne en France.

Un autre parti se distingue par son hostilité persistante envers le Maroc et sa bienveillance systématique à l’égard du régime algérien: le Parti communiste français. Pour des raisons historiques, il est resté prisonnier d’un logiciel politique des années soixante.

Son soutien au régime algérien, bien que moins ostentatoire que celui affiché par La France insoumise, demeure constant, indépendamment des fluctuations dans les relations entre Paris et Alger.

Une autre figure de la scène politique française semble, elle aussi, séduite par le discours algérien: Dominique de Villepin.

Ancien bras droit de Jacques Chirac — considéré comme le président français le plus proche du Maroc sous la cinquième République — Villepin vient de lancer son propre mouvement, La France Humaniste, et ne cache pas ses ambitions pour l’échéance présidentielle de 2027.

Récemment de retour d’un voyage en Algérie, l’ancien Premier ministre a surpris par un changement notable de ton. Son discours, désormais aligné sur les éléments de langage officiels d’Alger, tranche radicalement avec la tradition chiraquienne.
Il va jusqu’à remettre en question la reconnaissance par Emmanuel Macron de la souveraineté marocaine sur le Sahara, en adoptant la posture d’une neutralité prudente, évoquant une «question non encore tranchée par les Nations Unies», formulation chère à la diplomatie algérienne. Une position qui, aux yeux de nombreux observateurs, aurait de quoi faire se retourner Jacques Chirac dans sa tombe.
Les positionnements de ces partis sur les enjeux du Maghreb provoquent des fissures au sein de l’électorat français d’origine maghrébine. Par une sorte de balancier, les forces politiques qui roulent pour le régime d’Alger et sa propagande ne vont certainement pas bénéficier du vote des électeurs français d’origine marocaine.

C’est ainsi que le Maghreb, et plus particulièrement la rivalité entre le Maroc et l’Algérie, se sont imposés comme un véritable enjeu de politique intérieure en France, influençant les prises de position et les engagements de nombreux responsables politiques.

À l’horizon, deux échéances majeures se profilent: les élections municipales de 2026 et surtout la présidentielle de 2027,  à moins qu’une dissolution anticipée ne vienne rebattre les cartes sous le mandat d’Emmanuel Macron.

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