Italie: la droite et les antisystème se partagent les présidences du Parlement
Le Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème) a conclu samedi en Italie un accord avec la coalition de droite/extrême droite pour faire élire l’un des siens à la présidence de la Chambre des députés, en votant en échange pour une fidèle de Silvio Berlusconi au Sénat.
Le président de la République, Sergio Mattarella, doit entamer début avril ses consultations, qui s’annoncent à la fois serrées et ouvertes compte tenu de l’absence de majorité claire, de la nouvelle ouverture du M5S aux tractations politiques classiques et des failles béantes mises au jour cette semaine au sein de la coalition de droite.
Aussi bien cette coalition arrivée en tête avec 37 % et désormais dominée par la Ligue (extrême droite) de Matteo Salvini, que le M5S, devenu le premier parti du pays avec 32 % sous l’égide de Luigi Di Maio, revendiquent le pouvoir. "Nous avons été rapides, concrets et cohérents. Le prochain objectif est de faire naître un gouvernement sur un programme clair et respectueux des élections: les Italiens d’abord !", a lancé M. Salvini.
Le M5S se dit lui aussi prêt à discuter la formation d’un gouvernement autour de son propre programme, tandis que le Parti démocrate (PD, centre gauche) refuse pour l’instant de servir de "béquille" à qui que ce soit. MM. Salvini et Di Maio, qui réfutent toute idée d’alliance entre leurs forces antisystème et eurosceptiques désormais largement majoritaires, ont montré cette semaine que la communication fonctionnait entre eux, et l’une des hypothèses pourrait être un accord provisoire en vue d’une réforme électorale pour de nouvelles élections dès l’automne.
Remise à plat pour le gouvernement
Au Parlement, après plusieurs tours dominés par les bulletins blancs vendredi, il n’a fallu qu’un seul vote samedi au Sénat comme à Chambre des députés. Les scores confirment que la majeure partie des deux camps ont respecté les consignes dans les deux chambres. "Il n’y a rien de mal a faire des accords", a commenté pour l’AFP Davide Faraone, sénateur PD. "Le problème, c’est que ceux qui ont fait ces accords, ce sont ceux qui disaient justement que tout cela n’était qu’arrangements et magouilles et en plus, ils l’ont fait avec Berlusconi !" "Nous avons travaillé sur les présidences des chambres (…) et maintenant on va réfléchir en repartant de zéro sur un éventuel accord pour le gouvernement", a précisé Gianluigi Paragone, sénateur M5S.
Le nom de Mme Alberti Casellati avait été proposé juste avant le vote samedi matin, à l’issue d’une réunion de réconciliation des chefs de partis de la coalition de droite, après un coup de force de M. Salvini qui a lâché vendredi soir le candidat jusqu’alors exigé par M. Berlusconi.
La pillule a cependant dû être amère pour certains sénateurs M5S: Mme Alberti Casellati a été secrétaire d’Etat de M. Berlusconi dans les années 2000, d’abord à la Santé, où elle a fait embaucher sa fille, puis à la Justice, où elle a défendu les lois destinées à soulager le magnat des médias de la pression des juges. Elle a dû l’être tout autant pour nombre de députés de droite: M. Fico, militant de la première heure devenu un héraut des principes originels du mouvement fondé par le comique Beppe Grillo, est présenté par le quotidien Il Giornale (groupe Berlusconi) comme "le Grillino communiste", aux positions nettement plus à gauche que son mouvement sur l’accueil des migrants, l’euthanasie, les couples homosexuels…
Dans son discours de prise de fonction, en l’absence des élus de droite, ce Napolitain a prévenu que son "premier objectif" serait de "diminuer les coûts de la politique", alors que le M5S milite contre les avantages des parlementaires.