Maroc-patrimoine: Meknès sous la menace du temps et de l’indifférence

Meknès la belle de la vallée verdoyante, source d’eaux pures qui traine sa robe sur une superficie de 370 km carrés de la région Nord Ouest du Maroc. Meknès la princesse du 17éme siècle, chérie par son Roi qui l’orna de ses sept perles monumentales et qui lui tissa une dentelle royale Ismaïlienne sous forme d’un mur historique qui l’embellie et la protège de toute atteinte.

 

Houda Alfchtali

Meknès l’histoire, Meknès l’art, Meknès la culture, Meknès l’authenticité, Meknès NOUS, se voit aujourd’hui vulnérable, en perte d’authenticité, sous l’effet d’agressions scandaleuses contre son patrimoine artistique et culturel classé en 1996 patrimoine mondial de l’UNESCO, pour ‘’son influence considérable, selon les termes de l’Organisation onusienne, sur le développement de l’architecture, des arts monumentaux et de l’organisation de l’espace’’.

Aujourd’hui, Meknès, la capitale politique du Royaume au temps de Moulay Ismail, ne vit plus. Elle survit et se nourrit de son passé pour conserver la noblesse de son âme. Le temps et l’indifférence ont visiblement endommagé  son potentiel patrimonial et ont fait qu’une partie de l’identité et de la mémoire de la ville se trouve contrainte de disparaitre devant le manque de civisme et la négligence de ses enfants.

On ne cesse, s’indigne-t-on, de toucher à la parure de la belle princesse, lui ôtant ses perles une a une et ses édifices qui font sa richesse et sa particularité, sous ce silence affreux de ses enfants qu’elle a tant honorés, protégés, cultivés, et dont une majorité la quitte définitivement pour aller embrasser un bel avenir de ministres, ambassadeurs, universitaires, PDG de grandes sociétés et autres.. sans se soucier, outre mesure, du devenir de leur cité et sans manifester le moindre signe de reconnaissance envers leur ville d’origine, communément surnommée ‘’ le petit Paris’’.

Au lieu de tout cela, la main du sort lui fait tort, celle-ci ne fait que s’acharner sur la belle impériale depuis plus d’un quart de siècle; une sorte de malédiction qui fait que ses supposés serviteurs soient eux mêmes ses agresseurs qui prennent en cible l’âme culturelle et artistique de leur ville, notamment ses édifices culturels, ses anciens bâtiments et établissements administratifs, ses conservatoires dont l’un menace ruine, comme des dizaines de monuments qui en sont la fierté.

Mais le risque de voir disparaitre ce patrimoine est grand, vu l’état avancé de délabrement et le risque de voir ces anciens bâtiments s’écrouler, comme nombre de Riyads et de grandes maisons de la Médina, sans oublier les salles de cinéma qui nous ont tant fait goûter à la subtilité et au raffinement du septième art.

Des salles de cinéma disparues ou menacées

Et parmi justement les agressions les plus insoutenables, celles qui ont touché les salles du cinéma, avec en premier acte, la triste chute du cinéma ‘’Régent’’ que l’on a pleuré en silence en le voyant tomber du jour au lendemain pour céder place à un immeuble.

S’ensuit la fermeture du cinéma ‘’Empire’’, cette salle qui nous a enseignée le cinéma et où on a vu, aimé et discuté les meilleurs films du siècle lors de débats organisés par le « Ciné Club » de Meknès, disparu sans préavis, il y a deux décennies. Bien avant sa fermeture, la salle avait subi toute sorte de négligence avant de se transformer en un banal magasin de prêt à porter et ensuite en un bâtiment sans vie, comme ce fut le cas avec le ‘’Regent’’.

Quand aux belles salles de cinéma ‘’ABC’’ et ‘’Caméra’’, elles survivent dans l’oubli et risquent le même sort que leur consœur si aucune bonne volonté n’intervient pour sauver ces deux édifices qui faisaient jadis la gloire de la ville, notamment le cinéma ‘’Camera’’ auquel on associe aujourd’hui encore le souvenir de Jacques Brel, un des grands chanteurs de tous les temps, qui s’en est produit en 1966, attirant une foule de mélomanes venus de Casablanca, Rabat, Marrakech, Oujda, Fès et autres grandes villes du royaume, déguster les fusions rythmiques de l’artiste et ses envoûtantes percussions.

Situées dans la rue de Rwamzine, trois autres salles ont abrité l’enfance et la jeunesse des Meknessis, en leur présentant un style de films d’action, de Western et de romantisme Bollywoodien avec toute la richesse et la diversité de la culture orientale, tant approuvée à l’époque par les amoureux du chant et de la musique indiens.

Il s’agit d’abord des salles de cinéma ‘’Appolo’’ et ‘’Mondial’’, disparues il y a un quart de siècle, après être devenues pendant une longue période des salles fantômes coincées entre des commerces les rendant invisibles, jusqu’ à cette semaine où l’on apprend avec amertume que la salle de Cinéma ‘’Atlas’’ s’est fait à son tour démanteler pour usage commercial, suscitant colère et indignation d’un bon nombre d’intellectuels qui ont appelé à la signature d’une pétition contre cet acte de basse valeur .

Un appel légitime qui témoigne d’un sens hautement élevé de civisme et de patriotisme de la part des signataires qui comptent interpeller le ministère de la Culture.

 

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