Symposium à Genève sur la confiscation des droits et la mainmise sur les libertés en Algérie

Un symposium, organisé mercredi à Genève par l’Observatoire International pour la Paix et les Droits de l’Homme (IOPDHR), a pointé du doigt l’abysse entre les engagements internationaux en matière de droits de l’Homme de l’Algérie et sa pratique.

A l’occasion de ce symposium, , tenu au Palais des Nations en collaboration avec l’ONG Promotion du développement économique et social (PDES), le conseiller politique suédois et expert des affaires africaines, Bjorn Holtin, a indiqué qu’au vu du nombre de cas en suspens et des visites internationales suspendues ou entravées, l’Algérie représente un modèle de pays qui se soustrait à ses devoirs et obligations.

Mainmise sur les libertés

Il a, dans ce sens, évoqué l’interaction de l’Algérie avec la 4ème session de l’Examen périodique universel (EPU), soulignant que le pays n’a accepté que 113 des 229 recommandations reçues donnant lieu à un bilan « inquiétant ».

Pour sa part, M. Walid Kebir, militant politique et des droits de l’homme algérien et président de l' »Association maghrébine pour la paix, la coopération et le développement », a abordé les défis posés au droit à la liberté d’opinion et d’expression en Algérie, indiquant notamment que le régime militaire algérien a ajouté plusieurs amendements aux textes de lois afin de légitimer les abus contre les défenseurs des droits humains, les militants et les journalistes.

Selon Walid Kabir, le régime algérien est allé plus loin en élargissant la définition du crime de terrorisme, sans tenir compte des obligations de l’État en vertu du droit international. « Ceci leur permet d’harceler les militants des droits de l’homme et les blogueurs », a-t-il dénoncé.

La présidente de l’IOPDHR, Aicha Douihi, a de son côté présenté le rapport conjoint des deux ONG sur l’EPU de l’Algérie, évoquant des recommandations concernant plusieurs axes, à savoir la liberté de réunion, la liberté d’expression et d’association, l’exécution extrajudiciaire et la mise en œuvre des droits économiques, la protection des enfants contre l’exploitation, les conditions d’asile et l’État de droit.

L’Algérie refuse d’interagir positivement avec les visites onusiennes à Tindouf et ne montre aucune ouverture sur les mécanismes de contrôle internationaux, a observé Mme Douihi, soulignant que le pays refuse de ratifier des conventions internationales importantes.

Violations des droits et crimes de guerre

Dans la pratique, Mme Douihi a relevé que le manque d’indépendance de la justice ouvre la voie à des poursuites systématiques contre les activistes, politiciens et journalistes qui se retrouvent victimes d’une interprétation arbitraire de la notion de crime terroriste.

Concernant les camps de Tindouf, elle a mis en garde contre le danger des exécutions arbitraires perpétrées par les forces de l’ordre algériennes, alors que l’État se dérobe à sa responsabilité de sévir contre ces actes et de protéger les victimes.

Elle a également fait remarquer que les camps sont dépourvus des services essentiels, qui sont l’apanage des cercles de pouvoir du front séparatiste, en dépit des financements importants dédiés à l’habitat dans divers projets sociaux. Aucune avancée n’a été enregistrée, selon elle, dans l’amélioration des conditions des réfugiés et la mise en œuvre des recommandations adressées à l’Algérie lors de l’EPU de 2017.

Quant à l’expert néerlandais en comportement organisationnel et en anthropologie organisationnelle et membre du conseil d’administration de Human Rights without frontières à Bruxelles, Hans Noot, il a mis en lumière la situation anormale dans les camps de Tindouf et le gap enregistré par rapport aux normes de la Convention de Genève de réfugiés de 1951.

Les camps de Tindouf représentent une exception dans laquelle la population est privée de recensements, de rapports de protection et de carte de réfugié, a-t-il déploré, estimant que la population est victime de graves violations des droits de l’homme, dont certaines s’élèvent aux crimes de guerre, loin des yeux et de la vigilance internationale, et ce en donnant, de la part du pays hôte, le plein mandat à un groupe armé pour gérer les camps et lui assurer l’immunité.

En pointant du doigt les lacunes de l’arsenal juridique algérien, M. Noot a exprimé son étonnement quant au fait que le droit de la famille ne fait aucune mention des violences domestiques, regrettant que les femmes continuent de subir des violences sexuelles, sans que les autorités algériennes n’offrent de protection effective aux victimes de viol.

Une situation qui se prolonge dans les camps de Tindouf, a-t-il poursuivi, étayant son propos par les accusations de viol dont fait l’objet le chef des séparatistes Brahim Ghali par Khadijatou Mohamed, qui a été agressée à l’âge de 18 sans que les autorités algériennes ne se réagissent.

M. Hans Noot a également abordé le dossier du détournement de l’aide humanitaire à grande échelle, qui a été exposé par l’Office de lutte antifraude européen « OLAF » et par de nombreux rapports de l’ONU, et la mesure dans laquelle ce pillage a influé sur les conditions de vie dans les camps

Les deux ONG ont appelé Alger à autoriser les visites des associations humanitaires aux camps de Tindouf et d’y autoriser la constitution de partis politiques et d’ONG, ainsi qu’à enquêter sur les cas d’enlèvements et de disparitions forcées. Elles ont également exhorté les autorités algériennes à cesser la persécution des militants des droits de l’Homme et des journalistes, à libérer les détenus, à mettre fin à l’état d’urgence dans les camps et à œuvrer au recensement des réfugiés et à la mise en œuvre de la convention de Genève de 1951.

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