La solitude de Macron sur le Maroc

En temps normal, la visite d’un chef de parti français au Maroc aurait pu passer inaperçue, un événement anodin qui fait partie de l’épaisseur et de la richesse des relations non gouvernementales entre les deux pays. Aujourd’hui, contexte de crise oblige, pareil événement est scruté, suivi avec attention, valorisé comme un fait chargé de messages, susceptible d’être porteur de notables accélérations.

Cette situation a été vécue dans un passé récent lors de la visite d’une délégation du parti des Républicains conduite par leur patron Éric Ciotti et la maire du 7ème arrondissement, une des icônes du parti Rachida Dati. Aujourd’hui c’était à suivre à l’occasion de la visite du leader de la France insoumise, Jean Luc Mélenchon, à Marrakech, Casablanca, Rabat et Tanger.

Lors de la visite d’Eric Ciotti, le parti des Républicains, un parti qui porte les espoirs de la droite d’incarner l’alternative à Emmanuel Macron lors des prochaines présidentielles, avait redit avec force son soutien sans faille à la souveraineté du Maroc sur ses provinces sahariennes. Éric Ciotti avait profité de sa visite pour clouer au pilori la politique d’Emmanuel Macron : « la politique qui est conduite aujourd’hui à l’égard du Maroc ne va pas dans la bonne direction. […] Elle est déséquilibrée », tout en exprimant une position sans équivoque pour le Maroc : « sur la question du Sahara occidental, la souveraineté du Maroc est indiscutable ».

Même si avec Jean-Luc Mélenchon et pour des raisons de logiques propres au parti LFI, la déclamation de soutien à la marocanité du Sahara n’a pas été aussi vocale et aussi tranchée, il n’empêche que toutes les interventions du chef des insoumis français ont été empreintes d’une tonalité laudative à l’encontre de la proposition marocaine. Dans le bras de fer symbolique que se livre le Maroc avec Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon donne raison à Rabat. Jean Luc Mélenchon demande à Emmanuel Macron de prendre en considération les évolutions internationales autour du dossier du Sahara : « La prise de position des États-Unis d’Amérique, d’Israël et de l’Espagne a modifié le regard que le monde porte sur cette question. Je souhaite que mon pays le comprenne et que dans tous les cas on n’en fasse pas un sujet de querelle avec les Marocains ».

Les visites de personnalités comme Éric Ciotti et Jean-Luc Mélenchon au Maroc posent sur la table des discussions sur le positionnement des partis politiques français à l’égard des divergences qui empoisonnent les relations entre la France et le Maroc. Et il est aisé de se rendre compte que la majorité des partis politiques français penchent plus vers le soutien de la souveraineté territoriale du Maroc que pour la sympathie pour un mouvement séparatiste, soutenu par Alger.

La droite traditionnelle menée par les Républicains d’Eric Ciotti comme l’extrême droite incarnée par Marine Le Pen et Éric Zemmour sont totalement acquises à la cause marocaine. À gauche de l’échiquier politique, le Parti socialiste ainsi que la gauche dite de gouvernement n’expriment plus aucune sympathie pour la politique agressive et destructrice du régime algérien dans la région du Maghreb. Cette tendance sera accentuée par les dernières prises de position de Jean-Luc Mélenchon au Maroc. Le seul parti qui demeure recroquevillée sur des convictions favorables à l’aventure séparatiste du Polisario reste le Parti communiste français. Mais le peu d’influence qu’il exerce sur la politique française le rende presque inaudible et inopérant sauf quand il s’agit d’offrir une tribune au sein de l’Assemblée nationale à des personnes faisant la promotion du séparatisme anti-marocain.

Face à ce qui commence à ressembler à une presque unanimité des partis politiques sur la nature des relations que la France doit entretenir avec les pays du Maghreb, le flou diplomatique entretenu volontairement par les choix d’Emmanuel Macron est difficilement explicable. Lors de cette grande crise froide que traverse l’axe Paris/Rabat, de nombreuses voix issues de grands partis politiques ont à plusieurs reprises exigé de l’Elysée une meilleure clairvoyance dans sa gestion de la crise avec le Maroc. De nombreuses voix ont dénoncé aussi le pari perdu du président de la république sur le régime algérien. Emmanuel Macron  semble avoir perdu le Maroc sans avoir réussi à gagner l’Algérie, comme en témoigne les relations névrotiques qu’Alger continue à entretenir avec la France et la grande difficulté à organiser une visite du président algérien Abdelmajid Tebboune à Paris.

 

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