Pegasus: l’Etat marocain a le droit d’agir pour le compte d’une administration qui a été diffamée en France (vidéo)

Le tribunal de Paris a examiné, mercredi 26 janvier 2022, la recevabilité des poursuites engagées par l’Etat marocain contre Le Monde, Radio France, France Media Monde, Mediapart, L’Humanité, Forbidden Stories et Amnesty international qui ont accusé le Royaume sans la moindre preuve tangible d’utiliser le « logiciel espion Pegasus ».

Face aux esquives des prévenus qui contestent au Maroc le droit d’agir au nom de ses services diffamés par les médias français, l’avocat du Maroc, Me Olivier Baratelli, balaie d’un revers de la main leurs arguments et affirme que l’Etat marocain a le droit d’agir pour le compte de ses services et de « demander la réparation de l’atteinte à l’honneur et la considération de ses services diffamés« .

Outre la procureure qui a requis l’irrecevabilité des citations directes, déposées contre les médias français, les avocats des organisations et médias ont tour à tour demandé l’irrecevabilité de cette « procédure bâillon » , au nom de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse.

« Plus c’est gros, plus ça passe« , a dénoncé Me Olivier Baratelli. « On utilise des artifices de procédure, des moyens d’irrecevabilité, de prétendues nullités : Tout ce qu’il faut pour faire un écran de fumée afin d’éviter le débat de fond”, a déclaré l’avocat français à Altasinfo.fr.

Selon Me Baratelli, la demande est recevable car ce n’est pas l’Etat marocain, mais une administration – les services secrets – qui attaquent en diffamation.

« Pas moins de six fois » entre 2018 et 2019″, la Cour de Cassation est venue répéter qu’un Etat « n’était pas recevable pour agir en diffamation », a pour sa part plaidé Me Simon Foreman pour Amnesty International.

« C’est un exercice de communication exclusivement  pour réorienter l’actualité »  vers les poursuites judiciaires, a-t-il avancé.

« Quel est bien pratique de plaider que le Maroc serait irrecevable. Cela permet d’esquiver le grand mensonge et d’être condamné comme coupable d’une gigantesque manipulation internationale !« , a insisté Me Bartalli dans une déclaration à Atlasinfo.

Indiquant qu’ils sont même allés jusqu’à contester à l’ambassadeur du Royaume du Maroc en France le droit d’agir au nom de l’Etat marocain, Me Baratelli a tenu à préciser: « quel qu’il soit l’Etat, il est représenté en France par son ambassadeur« .

Et de réaffirmer que quand un ambassadeur du Maroc présente ses lettres de créances au président de la République et que ce dernier les accepte, il lui donne les pleins pouvoirs pour représenter l’Etat marocain en France.

« C’est la peur au vendre que les grands manipulateurs de l’opinion publique française et internationale essayent d’échapper à leur terrible responsabilité en agitant un artifice de procédure« , a souligné Me Baratelli.

Dans une tribune publié mardi dans l’hebdomadaire français Valeurs actuelles, Emmanuel Dreyer, agrégé des facultés de droit, professeur à l’École de droit de la Sorbonne (Université Paris 1) a soulevé cette question de recevabilité ou d’irrecevabilité.

« Peut-on interdire au Royaume d’accéder à la justice en France pour dénoncer une calomnie dont ses services seraient victimes ? », « Peut-on en effet imaginer que, sous prétexte de défendre la liberté d’expression d’organes de presse français, on interdise en France l’accès à la justice d’un État dont les services sont diffamés sur le territoire de la République ? « , s’est interrogé le juriste.

« L’accès au juge doit impérativement être préservé car, sans sa médiation, la liberté d’expression perd tout son sens: s’il devient possible de dire n’importe quoi, la vérité n’a plus aucun intérêt », a-t-il déploré.

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