Logiquement, le conseil constitutionnel devait clore le débat sur les retraites, fermer la parenthèse des contestations, lancer le pays dans une nouvelle séquence. Dans la réalité, la tension est à son comble et la pays se trouve dans une logique d’escalade.
En lançant le chantier de la réforme de la retraite, Emmanuel Macron pensait pouvoir convaincre une majorité de français, comptait sur sa capacité de séduction et de persuasion, pensait qu’une grande partie de la droite n’avait d’autres choix que de le soutenir. N’a-t-il pas puisé l’esprit même de cette loi dans son héritage politique ?
Et pourtant, ce qui devait être réglé comme un métronome est parti en vrille, plongeant le pays dans une spirale de contestation et de violence. Le recours dans des circonstances dramatiques au 49.3, article plombe le débat parlementaire et la validation du conseil constitutionnel de la réforme des retraites qui, au lieu d’adoucir la loi, l’a débarrassé de tous ses atouts sociaux les plus attractifs, rendant la copie validée plus cruelle que la copie gouvernementale proposée. Autant de facteurs qui compliquent lourdement la vie du président Emmanuel Macron et de sa cheffe de gouvernement Elisabeth Borne.
Aujourd’hui et après un long bras d fer avec les syndicats et l’opposition politique, Macron a gagné. Mais sa victoire a un goût d’échec. Ainsi ses détracteurs se posent cette question qui parait cruelle pour sa gouvernance: à quoi bon remporter une bataille si au bout du compte les quatre années qui restent de son second mandat sont hypothéquées et menacées de ruptures sociales permanentes ?
Un des signes qui ne trompe pas, les leaders syndicaux refusent l’invitation de Macron à venir discuter à l’Élysée, qu’à la condition que le possible retrait de la réforme des retraites soit évoqué. L’escalade verbale de ces centrales syndicales est telle qu’une menace de boycotter tous les tables de négociations à venir avec le gouvernement est brandie le plus sérieusement du monde.
Aujourd’hui si Emmanuel Macron ne trouve pas la recette magique pour dégoupiller cette tension qui s’est installée sur tout le pays à cause de cette réforme des retraites, il court le risque de se retrouver seul à gérer le pays à coups de 49.3. Ce qui équivaut selon de certains à jeter au quotidien un jerricane de gasoil sur des braises effervescentes.
Et la question qui domine tous les cénacles aujourd’hui est la suivante : de quels instruments politiques dispose le président Macron pour sortir de ce qui apparaît à une impasse politique susceptible de paralyser les quatre années qui restent de son mandat ? Son pari sur l’essoufflent du mouvement de la contestation sociale est aussi hasardeux que peu pertinent. Un changement de Premier ministre, même souhaité par beaucoup y compris au sein de la majorité présidentielle, ne semble pas la solution pour mettre fin à cette angoisse sociale qui s’est emparée du pays.
Emmanuel Macron va certainement tenter de faire oublier au plus vite cette mauvaise séquence. Il tentera de le faire en essayant d’engager les Français sur des chantiers de réformes susceptibles de générer des compromis politiques comme il avait déjà tenté de le faire sur le projet de fin de vie. D’autres sujets plus clivants comme la loi sur l’immigration vont certainement passer à la trappe.
Les enjeux pour Emmanuel Macron dans cette période post promulgation du projet de loi sur les régimes sont immenses . Ou il trouve l’inspiration politique pour donner un nouveau souffle à sa gouvernance, ou il reste verrouillé sur des blocages et des ruptures avec les partenaires sociaux et devrait sacrifier au mieux sacrifier son agenda réformiste, au pire conduire le pays à coups de 49.3.
Dans cette crise des retraites est apparu vers la fin de son processus démocratique une forme de divergence entre Emmanuel Macron et sa première ministre Elisabeth Borne. Le président est apparu dans la posture de celui, ferme et déterminé, qui passe en force sans accorder la moindre importance à la possible casse sociale et la Première ministre dans le rôle De celle qui a de l’empathie pour les partenaires sociaux et qui aspire à calmer les ardeurs.
Était -ce une division volontaire et calculée de travail entre les dix têtes de l’exécutif ? Ou était-ce une divergence de style et de posture qui se paiera cash dans les jours à venir ?