La cour d’appel de Versailles, saisie par Amazon France qui contestait l’ordonnance du tribunal de Nanterre l’enjoignant d’évaluer les risques liés au Covid-19 et en attendant de limiter ses livraisons aux seuls produits essentiels, rendra sa décision vendredi à 14h, a-t-on appris mardi auprès de la direction et de source syndicale.
Le tribunal judiciaire de Nanterre avait enjoint le 14 avril à Amazon France de limiter ses activités aux produits d’hygiène, produits médicaux et d’alimentation dans l’attente d’une évaluation des risques conduite avec les représentants du personnel, sous peine d’une amende de un million d’euros par infraction constatée.
Amazon France, jugeant impossible de définir précisément les produits autorisés à la livraison, a préféré fermer ses sites français (10.000 salariés) jusqu’à jeudi et a fait appel devant la cour d’appel de Versailles, qui a examiné l’affaire mardi.
Me Judith Krivine, qui défendait Solidaires-SUD Commerce, a pointé lors de l’audience une absence d’évalution des risques, notamment psycho-sociaux, de la part d’Amazon, et fait état de pressions exercées sur les salariés qui faisaient valoir leur droit de retrait.
Pour Laurent Degousée de SUD Commerce, « la seule question qui vaille est comment on articule la liberté d’entreprendre et le droit à la protection de la santé des salariés ».
Selon ce syndicat, numéro un dans l’entreprise, Amazon France paie « le fait d’avoir agi de manière unilatérale et d’avoir multplié les effets d’annonce plutôt qu’avoir procédé à une évaluation partagée des risques ».
Amazon France a indiqué dans une communiqué avoir « à nouveau présenté » des « preuves concrètes sur les mesures de sécurité qui ont été mises en œuvre, celles-ci ayant été appliquées dans le strict respect des directives des autorités françaises et en y associant les représentants du personnel de nos sites ».
« Au regard de ce nouveau calendrier judiciaire et compte tenu de l’état d’avancement de la nouvelle évaluation des risques sur l’ensemble des centres de distribution », l’entreprise « appréciera de nouveau la situation de ses centres de distribution » français, actuellement fermés.
Deux salariés du site de Lauwin-Planque (Nord), près de Douai, ont lancé une pétition en faveur de la reprise du travail, signée mardi par quelque 15.500 personnes.
« Les syndicats ne nous ont pas demandé notre avis », souligne Priscilla Soares, une des initiatrices de la pétition. Si elle reconnaît qu' »au début, Amazon n’était pas préparé », elle juge que « ça s’est vite organisé avec des distances de sécurité et du matériel » et assure qu' »à aucun moment » elle ne s’est personnellement « sentie en danger ».
Le procureur de la République de Douai, Frédéric Teillet, a par ailleurs classé sans suite la plainte pour « mise en danger de la vie d’autrui » déposée le 31 mars par l’union locale de la CGT contre Amazon, qui exploite un entrepôt à quelques kilomètres.
Le parquet a considéré qu’Amazon a produit des pièces montrant qu’il n’y a pas eu de « maquement délibéré à une obligation particulière de prudence ou de sécurité » en mettant en place des mesures ayant suivi l’évolution des connaissances sur le virus. Et que le risque de contracter le Covid-19 n’expose pas à un « risque imminent de mort ou de blessures graves ».
« Les statistiques actuelles comptabilisant à ce jour plus de 20.000 morts en France du Covid-19, sont à l’évidence de nature à caractériser le risque immédiat de mort ou de blessures graves, par le non-respect des mesures de santé et de sécurité des travailleurs de la société Amazon », maintient pour sa part la CGT qui « s’étonne » de la « rapidité » du classement sans suite.