L’organisation de défense des droits de l’Homme « Amnesty International » a dénoncé une « escalade très inquiétante dans la répression », menée par les autorités algériennes contre les droits à la liberté d’expression et d’association en amont des élections.
Réagissant à l’arrestation des journalistes Khaled Drareni et Ihsane El Kadi, ainsi que du leader de l’opposition Karim Tabbou, l’organisation internationale a, par la voix de sa directrice adjointe pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, Amna Guellali, souligné qu’au lieu d’enfermer des journalistes et des opposants politiques pour écraser la dissidence et intimider les membres du mouvement contestataire du Hirak, elles feraient mieux de s’attacher à respecter leurs obligations en termes de droits humains.
« Il est fort probable que les trois hommes aient été pris pour cibles à titre de représailles en raison de leurs liens avec le mouvement du Hirak, qui réclame un changement politique radical en Algérie en usant de moyens pacifiques », a-t-elle relevé dans un communiqué.
Elle a dénoncé leur interpellation qui « s’inscrit dans la politique menée ces derniers mois à coups d’arrestations arbitraires et de poursuites intentées contre des journalistes et des militants qui réclament plus de justice sociale et des réformes politiques ».
Mme Guellali a fait savoir que ces trois hommes ont été arrêtés séparément dans la soirée du 10 juin et détenus dans le centre de sécurité d’Antar pour être interrogés, rappelant que ce n’est pas la première fois qu’ils se retrouvent dans le collimateur des autorités algériennes.
« Khaled Drareni a été condamné à trois ans de prison à l’issue d’un procès manifestement inique, pour avoir couvert le mouvement contestataire du Hirak en août 2020. Sa peine a été réduite à deux ans en appel. Il a été libéré en février 2021 et son affaire a été transmise à la Cour suprême pour être rejugée en mars 2021 », a rappelé Amnesty International.
Pour le leader politique Karim Tabbou, il a été condamné en mars 2020 à un an de prison pour des « accusations forgées de toutes pièces, en lien avec des commentaires figurant dans des vidéos publiées sur la page Facebook de son parti, dans lesquelles il critiquait le rôle de l’armée dans la politique », souligne l’organisation.
De son côté, Ihsane El Kadi, directeur de la station « Radio M » et du site d’information « Maghreb Emergent », est poursuivi en justice pour diffamation et outrage envers le président algérien, a-t-elle poursuivi, relevant qu’en réaction, les autorités ont bloqué les médias qu’il dirige.
A ce jour, 223 personnes sont détenues en Algérie en lien avec le mouvement de contestation du Hirak, selon les organisations et militants locaux qui observent la situation des droits humains sur le terrain.
D’après le comité national de défense des droits de l’Homme (CNLD), la justice algérienne a inculpé ces détenus d’opinion et prisonniers politiques de divers graves délits comme le classique « atteinte à l’unité nationale » ou la traditionnelle appartenance à « une organisation étrangère complotant contre l’autorité de l’Etat ».
D’après le CNLD, les griefs retenus contre les prévenus, selon les dossiers, concernent également « attroupement non armé », « rébellion », « trouble à l’ordre public » et « violation des dispositions sanitaires relatives à la Covid-19 », ainsi que « diffusion de publications pouvant porter atteinte à l’intérêt national ».