Von der leyen reconduite à la tête de la Commission…L’Europe fait le choix de la continuité
Elle était le ‘’plan A’’ des dirigeants des États membres de l’Union européenne, sans aucune autre option sur la table. Et les eurodéputés l’ont entériné jeudi. En reconduisant la présidente sortante de la Commission européenne, Ursula Von der leyen, pour un nouveau mandat de cinq ans, l’Europe fait ainsi le choix de la continuité et de la stabilité, dans un contexte ne laissant point de place à davantage d’incertitudes et de turbulences.
Dans son discours, elle a multiplié les signes d’assurance vers son camp, le Parti populaire européen (PPE), les deux partenaires de la coalition traditionnelle européenne (les socialistes du S&D et les libéraux de Renew) mais aussi les Verts, tout en marquant clairement la césure avec le bloc d’extrême droite. « Jamais je n’accepterai que les démagogues et les extrémistes détruisent notre mode de vie européen’’, a-t-elle tranché.
Le choix de ‘’la continuité et de la raison’’ posé et acté, la désormais nouvelle cheffe de l’Exécutif va s’atteler à promouvoir, dit-elle, une ‘’Europe plus forte, qui assure la prospérité, qui protège les personnes et qui défend la démocratie, qui garantit l’équité sociale et qui vient en aide aux personnes, qui met en œuvre ce qu’elle a convenu de manière équitable, et qui s’en tient aux objectifs du Pacte vert pour l’Europe de manière pragmatique, en respectant la neutralité technologique et en faisant preuve d’innovation’’.
L’Allemande de 65 ans, qui marchera sur les traces du Français Jacques Delors et du Portugais José Manuel Barroso, ses seuls prédécesseurs à avoir enchaîné deux mandats à la tête de l’exécutif européen, ne part pas d’une feuille blanche. Ses partisans estiment que sa ‘’gestion efficace’’ des multiples crises, du Brexit à la pandémie de coronavirus, en passant par la guerre en Ukraine et la crise de l’énergie, lui a conféré un solide statut, qu’il convient désormais de mettre à profit.
Pour dissiper certains doutes selon lesquels son second mandat n’aurait pas la même ambition que le premier, Mme Von der leyen a dévoilé de nouvelles propositions et distillé les promesses, qui correspondent, en large partie, aux demandes exprimées par les principales familles politiques de l’hémicycle.
Son choix est clairement défini. Pour les cinq prochaines années, l’économie sera à la tête des priorités de la Commission von der Leyen II, qui promet de promouvoir la prospérité et la compétitivité « durables » de l’UE.
Une promesse qui passera, explique-t-elle dans ses ‘’orientations politiques 2024-2029’’, par la facilitation de la vie des entreprises. Chaque commissaire européen devra ainsi étudier comment alléger la charge administrative, en particulier sur les PME. Il sera aussi question de mettre en place un « pacte pour une industrie propre » qu’elle s’engage à présenter dans les 100 premiers jours de son mandat.
‘’Il s’agit de simplifier et de garantir l’accès à un approvisionnement énergétique et à des matières premières bon marché, durables et sûrs, ainsi que d’investir pour ce faire, et préparer ainsi la voie à la réalisation de l’objectif de réduction des émissions de 90% à l’horizon 2040, que nous proposerons d’inscrire dans notre loi européenne sur le climat’’, engagement cher aux écologistes, qui l’ont majoritairement soutenu, même s’ils ne font pas ‘’officiellement’’ partie de sa coalition.
L’un des leviers financiers pour y parvenir sera la mobilisation de l’épargne privée, qu’elle veut voir davantage investie dans l’agriculture, l’industrie et les technologies numériques ou stratégiques, avec l’aide de la Banque européenne d’investissement (BEI).
« Nous proposerons une Union européenne de l’épargne et des investissements. Les start-ups européennes ne devraient pas avoir besoin de se tourner vers les États-Unis ou l’Asie pour financer leur expansion ».
En outre, un nouveau Fonds européen pour la compétitivité soutiendra des projets communs et transfrontières dans l’innovation, en vue de ‘’garantir qu’une technologie stratégique sera développée et fabriquée ici, en Europe. »
Le secteur agricole, qui vit au rythme des manifestations de colère des agriculteurs à Bruxelles et partout en Europe, ne sera pas oublié. « Il est essentiel que les agriculteurs disposent d’un revenu équitable et suffisant, mais aussi de récompenser les agriculteurs qui travaillent en harmonie avec la nature », souligne l’Allemande.
Face aux menaces militaires, la conservatrice allemande veut faire de l’Union européenne de la défense une réalité. Une ambition qui se déclinera à travers la désignation d’un(e) commissaire chargé(e) de la défense et la création d’un véritable marché unique pour les produits et services de défense. « Nous devons investir plus dans les capacités de défense haut de gamme. Non seulement pour protéger notre espace aérien, mais aussi comme symbole fort de l’unité de l’Europe en matière de défense. »
Quant aux frontières extérieures, elle envisage de les renforcer grâce à une « gestion numérique européenne pleinement opérationnelle » et propose de tripler le nombre de garde-frontières et de garde-côtes européens de Frontex, pour le porter à 30.000, tout en prônant un nouveau « pacte pour la Méditerranée » qui fera la part belle aux « partenariats stratégiques ». Un Commissaire européen sera exclusivement chargé de la région méditerranéenne.
Parmi une pléiade d’autres mesures, la cheffe de l’Exécutif prône un plan européen pour le logement visant à examiner « tous les facteurs » à l’origine de la crise du logement, une refonte du budget de l’UE, mieux adaptée aux besoins de chaque État membre et une feuille de route pour les droits des femmes.
La prochaine étape est désormais la constitution de la Commission. La Présidente élue de la CE va maintenant envoyer des lettres officielles aux chefs d’État et de gouvernement des États membres pour les inviter à présenter leurs candidats aux postes de commissaires européens (de préférence un homme et une femme, pour atteindre la parité dans le nouvel exécutif). Le Parlement procédera ensuite à l’audition des candidats dans les commissions compétentes après l’été. Les auditions des commissaires devraient avoir lieu fin septembre, début octobre, ce qui, sauf surprise, permettrait une entrée en fonction du nouvel exécutif au 1er novembre.