Quatre questions à Anne l’Huillier, prix Nobel de physique 2023

L’une des distinctions les plus prestigieuses au monde, le Prix Nobel continue d’incarner l’excellence et l’accomplissement dans les domaines de la science, de la littérature, de la paix et de l’économie. Chaque lauréat de ce Prix rejoint les rangs des pionniers et des visionnaires, dont les contributions ont laissé une empreinte indélébile dans l’histoire de l’humanité.

Dans un entretien à la MAP, la franco-suédoise Anne l’Huillier, prix Nobel de physique 2023, nous plonge dans les expériences clés qui ont façonné sa passion précoce pour la physique ultrarapide, ainsi que son rôle crucial en tant que modèle et mentor, notamment pour les femmes aspirant à exceller dans des domaines scientifiques souvent dominés par les hommes.

1-En qualité de précurseure dans le domaine de la recherche en physique ultrarapide, pourriez-vous partager un moment clé ou une expérience singulière qui a consolidé votre passion pour ce domaine particulier ?

Un moment fondateur qui demeure gravé dans ma carrière remonte à 1987, au Centre d’Études Nucléaires de Saclay. Cette première expérience a dévoilé l’inattendu : Des ammonites d’or à des niveaux remarquablement élevés.

Ce moment a non seulement captivé mon intérêt, mais il a également été déterminant, influençant toute ma trajectoire professionnelle postérieure. La surprise et l’extrême intérêt suscités par cette observation ont engendré un engagement continu dans la recherche, orienté vers des applications concrètes.

2-La physique ultrarapide offre une perspective unique sur les processus quantiques à une échelle de temps extrêmement réduite. Comment avez-vous surmonté les défis scientifiques et techniques pour explorer ces attosecondes et quelles satisfactions tirez-vous de cette exploration ?

Le parcours vers l’exploration des attosecondes (l’unité de temps la plus petite actuellement mesurable) a constitué une épreuve exigeante, requérant une persévérance tenace et un dévouement soutenu. Pendant une décennie, l’un des défis majeurs résidait dans l’énigme entourant la mesure précise des attosecondes. Les complexités scientifiques et techniques inhérentes à cette échelle temporelle extrêmement réduite ont jeté un voile d’incertitude sur la possibilité même d’explorer ces infimes fractions de seconde.

La persévérance s’est révélée être une vertu cruciale durant ces moments d’incertitude persistante. Face à des obstacles apparents, notre engagement inébranlable dans la poursuite de la compréhension des attosecondes a été le moteur de notre avancée.

Aujourd’hui, enfin, le paysage commence à se clarifier, et les fruits de ces efforts constants sont palpables. Nous sommes à un tournant où les technologies et les méthodologies ont évolué, au point où nous pouvons véritablement explorer les applications pratiques de la physique ultrarapide. Cette réalisation est source de satisfaction pour l’ensemble de la communauté scientifique, qui peut désormais accéder à un domaine autrefois enveloppé de mystère.

Et cette satisfaction résulte non seulement de la résolution des défis techniques, mais aussi de la conviction que la recherche sur les attosecondes contribuera de manière significative à notre compréhension fondamentale de la nature quantique de l’univers.

Ainsi, je tiens surtout à dire que la poursuite passionnée de la physique ultrarapide transcende les obstacles initiaux, pour éclairer de nouveaux horizons scientifiques.

3-Outre votre contribution exceptionnelle à la recherche, comment percevez-vous votre rôle en tant que mentor pour la prochaine génération de scientifiques, en particulier pour les femmes cherchant à s’épanouir dans des domaines scientifiques, souvent dominés par les hommes ?

En tant que cinquième femme en physique à recevoir le prix Nobel, je suis pleinement consciente de l’impact de mon rôle. Être la deuxième femme en France, après Marie Curie à être honorée revêt une signification particulière.

Je perçois ma responsabilité comme étant celle d’une source d’inspiration pour les nouvelles générations de femmes scientifiques. Mon message est clair : malgré les obstacles, il faut persévérer dans votre amour pour la physique et ne laisser pas les découragements extérieurs ébranler vos ambitions !

4-Lorsque vous ne vous consacrez pas à la recherche, comment parvenez-vous à équilibrer votre vie professionnelle et personnelle ? Y a-t-il des activités ou des intérêts en dehors de la physique qui alimentent votre créativité et votre énergie pour votre travail scientifique ?

En dehors de la recherche, ma vie familiale avec des enfants adultes contribue à créer un équilibre essentiel. L’importance d’une vie de famille est primordiale pour moi. En outre, la pratique régulière du sport est une composante indispensable de ma routine.

En outre, la littérature et la musique me permettent de cultiver un équilibre holistique, renforçant ainsi ma capacité à aborder la recherche avec une approche riche et équilibrée.

Le maintien de l’énergie nécessaire pour mon travail scientifique trouve une source dans ces activités qui favorisent un équilibre sain entre les aspects professionnels et personnels de ma vie.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite