Avec la reprise des bombardements israéliens sur la Bande de Gaza, après une trêve de quelques jours, le cessez le feu, et avec lui le retour d’une paix armée, s’éloigne de la région. Israël semble s’être fixé des objectifs à la fois difficiles à déterminer et impossibles à atteindre dans un temps court. Le temps que peut durer encore le soutien inconditionnel accordé jusqu’au jour d’aujourd’hui par les Américains et les Européens.
En effet la poursuite de ces bombardements massifs contre les civiles palestiniens les pertes humaines en milliers est difficilement supportable pour les opinions du monde qui ne comprennent ni l’utilité de cette guerre ni les mécanismes de l’empathie américaine et européenne à l’égard d’une armée israélienne motivée par une expédition punitive aveugle.
Depuis, de nombreuses tentatives diplomatiques, dont celle du Maroc, ont essayé de faire baisser la tension, d’obtenir un cessez-le-feu pour préparer les conditions d’une solution politique solide et durable. Mais sans grand succès. Israël, enivré par son obsession de représailles, ne voulait mettre en avant qu’une seule stratégie militaire avec un double objectif à réaliser dans l’immédiat : la libération de tous les otages israéliens détenus pas le Hamas et l’éradication à jamais de cette organisation.
Après avoir été un des grands soutiens à Israël au point de formuler depuis Tel-Aviv l’étonnante idée de former une coalition internationale pour lutter contre le Hamas, sur le modèle de celle qui a démantelé Daesh, Emmanuel Macron est un des rares dirigeants occidentaux à avoir formulé à haute voix des réserves, voire des réserves quant à ces buts de guerre israéliens. Si, dit-il, Israël voudrait éradiquer le Hamas, cette opération pourrait prendre une dizaine d’années et la guerre dans la région aussi. Israël doit fixer des objectifs réalisables et à court terme. Tel semble être aujourd’hui le message français sur cette crise. Avec une Espagne qui menace de reconnaître de un État palestinien et une Allemagne qui a récemment changé de ton à l’égard d’Israël, le président français peut dérouler son argument sans risque de se sentir seul.
Il est vrai qu’Emmanuel Macron souffre actuellement d’un déficit de crédibilité à l’international comme semble le montrer son incapacité à organiser une réunion au sommet des pays directement concernés par la guerre au Proche-Orient en marge de la COP 28, son message a eu des répercussions et des résonances au-delà de l’atlantique. A Washington tout particulièrement au sein d’une classe politique qui commence à s’interroger sur la pertinence de ce soutien américain inconditionnel à l’armée israélienne dans sa stratégie de la terre brûlée menée à Gaza.
Officiellement, l’administration de Joe Biden est avec la politique de Benyamin Netanyahou comme le montre le soutien militaire et économique massif apporté par la Maison Blanche à Israël et les multiples visites des responsables politiques américains à ce pays . Mais récemment en plus d’une mauvaise humeur montée de l’appareil diplomatique américain, le questionnement est là: jusqu’à quand faut-il garantir une soutien à cette guerre sans risquer d’y laisser des plumes? Récemment aussi bien la vice présidente américaine Kamala Harris que le ministre de La défense Lloyd Austin ont exprimé des réserves sur la manière dont Israël mène ses opérations militaires qui provoquent d’énormes pertes civiles palestiniens. Lloyd Austin a même évoqué le spectre d’une défaite stratégique israélienne si l’armée s’entête à s’attaquer aux civiles palestiniens.
Cette petite musique américaine très critique à l’encontre d’Israël est encore timide mais elle a de fortes chances de prendre du volume au fur et a mesure que les élections américaines approchent. Mais aussi au fur et à mesure que la contestation de cette guerre et de ces buts se propage au sein de la société américaine.
Benyamin Netanyahou peut se permettre le luxe d’ignorer les avertissements européens, français, espagnol et récemment allemand , mais pourrait-il indéfiniment continuer à ignorer les critiques et les réserves américaines de cette guerre et de ses buts au risque de s’aliéner une administration qui lui a donné jusqu’à présent toute latitude pour assouvir sa soif de vengeance? La paix au Proche-Orient est une affaire américaine. Seul Washington dispose d’un arsenal de pression suffisamment persuasif pour convaincre Israël de stopper cette sanglante aventure militaire.