Emmanuel Macron sur TF1 et LCI : une heure pour convaincre
Le président français sera, pour la première fois depuis son élection, interrogé à la télévision (20 h 5) pour s’expliquer et répondre aux critiques.
Pour atteindre une audience maximale, ce sera à l’heure de pointe (20 h 5) du média réputé le plus puissant de France. Chaque dimanche soir, le JT de TF1 rassemble en moyenne 6,6 millions de personnes et 28 % des téléspectateurs, selon l’audience moyenne de septembre. L’entretien sera également diffusé sur LCI. Avec huit caméras autour de lui, il sera interrogé dans son bureau de l’Élysée par trois vedettes de la chaîne privée, David Pujadas, Anne-Claire Coudray et Gilles Bouleau. Au menu : style présidentiel, politique économique et sociale, action internationale.
Image de président des riches
Depuis son élection, Emmanuel Macron, partisan d’une parole présidentielle « rare », a évité les interviews télé, zappant celle devenue traditionnelle du 14 juillet. Il n’a donné que cinq interviews : deux à des groupes de journaux français et européens, un entretien-fleuve au magazine Le Point , un autre à la chaîne américaine CNN et samedi à l’hebdomadaire allemand Der Spiegel . Il a préféré s’adresser directement aux Français sur les réseaux sociaux, dans la rue ou lors de déplacements.
Or, depuis cet été sa popularité a lourdement chuté, passant de 60 % d’approbation en juin à 44 % en octobre, selon le baromètre Ifop/Fiducial. Une dégringolade surtout marquée dans l’électorat issu de la gauche alors qu’il remonte un peu à droite. Depuis plusieurs semaines, ses détracteurs l’accusent de multiplier les « cadeaux aux riches »
En cause, sa réforme de l’ISF, qui ne taxera plus que le patrimoine immobilier, et l’instauration d’une taxe à taux unique de 30 % sur les revenus du capital. L’allègement pour les plus fortunés totalisera 5 milliards selon le gouvernement, 8 milliards selon l’OFCE. En parallèle, les contrats aidés et les aides au logement baisseront, la CSG augmentera, il y aura un train d’économies. Ce qui a valu à l’exécutif l’accusation par la gauche de mener une politique « de droite », à l’image de l’ex-Premier ministre PS Bernard Cazeneuve samedi, inquiet d’un « sentiment d’injustice ». La France insoumise et le PCF dénoncent un « président des riches ».
Selon un sondage Viavoice de septembre, 53 % des Français jugent sa politique économique profitable d’abord aux plus aisés.
Renforcer sa « jambe sociale »
La gauche et plusieurs syndicats critiquent aussi les ordonnances réformant le Code du travail, dont la ratification doit être votée au Parlement en novembre. Deux manifestations en demi-teinte ont été organisées en septembre par la CGT, avec Solidaires et la FSU, puis La France insoumise contre « un coup d’État social ». La CGT, rejointe par Solidaires, prévoit une troisième journée jeudi. Des fonctionnaires et des retraités sont aussi descendus dans la rue.
Le gouvernement défend ses choix fiscaux avec la volonté affichée de relancer « l’économie productive » et réduire encore les déficits. En même temps, il vante des mesures pour les classes moyennes et défavorisées : réduction de la taxe d’habitation et des cotisations sociales. Pourtant, même dans la majorité, des voix appellent Emmanuel Macron à renforcer sa « jambe sociale », comme le président du MoDem et ex-ministre François Bayrou.
« Moment de pédagogie nécessaire »
L’exécutif vient d’amorcer la réforme périlleuse de l’assurance chômage, régime déficitaire qu’il veut étendre aux indépendants et aux démissionnaires, en contrôlant plus strictement les abus. Il prépare aussi un vaste plan pour la formation et de l’apprentissage, clés selon lui de l’« égalité des chances ». « C’est un moment opportun pour expliquer son action », car « un chapitre se ferme (ordonnances) et un autre s’ouvre (apprentissage, formation, assurance chômage) », selon l’Élysée. « Moment de pédagogie nécessaire », dans « une étape charnière », pour le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner.
Cela intervient aussi après des propos polémiques contre les « cyniques », les « fainéants », ceux qui « foutent le bordel », ou contre la « jalousie française » envers la réussite. Emmanuel Macron a assuré à l’hebdomadaire allemand Der Spiegel qu’il n’était « pas arrogant », mais « déterminé » à réformer. Le président, qui réfute la lecture « gauche-droite » et se revendique « progressiste », doit se rendre en banlieue parisienne mardi et s’exprimer sur la lutte contre la pauvreté. Il y défendra l’« investissement social », plutôt que l’aide sociale.