Musulmans sous pression en Europe
Une période dure et angoissante, celle que vivent les musulmans d’Europe. Encore plus dure celle qui s’annonce. Dans le radar de l’actualité sanglante et anxiogène, ils sont pointés du doigt, accusés de complicité passive avec des démarches violentes, sommés de prendre de la distance avec les discours et les postures de haines que certains, au nom de leur appartenance à cette communauté et à cette religion, commettent des actes de rupture et s’inscrivent des démarches et des logiques terroristes.
Par Mustapha Tossa
Après un faisceau d’appréhensions, Bruxelles a été le coup de grâce qui avait fini par installer d’effrayantes certitudes dans l’esprit de beaucoup. La première est celle du milieu incubateur incarné physiquement par ce tristement célèbre quartier de Molenbeek dans lequel un terroriste en fuite, Salah Abdessalam a pu disparaître pendant quatre longs mois, ce qui est une interminable éternité dans la traque terroriste d’un homme clairement identifié. Le seconde est ce cliché effrayant de l’existence d’une cinquième colonne prête à offrir des ressources humaines à l’exécution d’agendas terroristes planifié depuis la Syrie ou la Libye où certaines régions du Sahel, devenus depuis les quartiers généraux des entreprises de la terreur.
Cet état d’esprit est de nature à donner un grand coup de fouet à l’atmosphère islamophobe qui s’est installée dans les opinions européens. Échaudées par les vagues de réfugiés qui s’abattent sur les rives de l’Union, les actes islamophobes sont en constante croissance. Violences physiques, et attaques contre les biens des personnes, la situation fut comme tellement graves et inquiétante par le gouvernement français qu’il vient de lancer une campagne de clips vidéos dénonçant le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie.
Il faut dire que les postures et le discours racistes sont sont libérés. Récemment deux événements distincts ont donné le tempo de l’ambiance. Le premier est cet acte symboliquement violent d’accrocher deux têtes de cochons à la porte de la résidence de l’ambassadeur du Maroc à Paris. La signature est aussi identifiable que le message de xénophobie est clair. Ce triste événement rappelle étrangement les démarches de certains groupes de l’extrême droite qui profitant de l’anonymat de la nuit souillent les mosquées et les carrés musulmans dans les cimetières.
Le second concerne les sulfureuses déclarations de la ministre française de l’enfance et des droits de la femme Laurence rossignol qui, en stigmatisant les maisons de mode et de haute couture qui tentent d’investir dans le création de vêtements ou de style dit "islamique" accusées de militer pour "la promotion de l’enfermement du corps de la femme", elle se laissa entraîner dans cet étrange dérapage : " Il y a des femmes qui choisissent, il y avait aussi des nègres afric… des nègres américains qui étaient pour l’esclavage".
Ce contexte impose aux musulmans de France d’énormes défis dont celui d’une brûlante nécessité: Comment faire pour que ses jeunes, même très rares, puissent rester imperméable au discours de la haine et de la violence produit et disséminé par les organisations terroriste d’Afrique et du Moyen Orient? … Sans le dire, il est demandé à cette communauté et surtout à son encadrement religieux d’ériger un mur protecteur entre les musulmans de France et ces organisations qui se livrent aux prosélytisme du discours radical.
Cette situation est en train de devenir explosive. Elle intervient dans un contexte électoral sensible où les forces politiques en compétition sont déjà tentées par une surenchère sur le sujet. Entre une droite dans l’opposition qui veut faire un procès en incompétence sécuritaire à la gauche. Et un gouvernement qui veut effacer cette accusation d’angélisme que lui assènent ses détracteurs. Tapis dans l’ombre, Marine Le Pen et l’extrême droite comptent les points et ne ratent aucune occasion pour faire valoir que leurs visons de l’immigration et de l’Islam ont été largement validées par les événements.
En pleine essor des craintes terroristes, le premier ministre Manuel Valls s’est encore distingué par une prise de position très nette sur la question de la radicalisation. Lui qui s’était déjà fait remarquer par sa célèbre formule sur "l’islamo-fascisme ", Il vient de livrer sa vision : "Les salafistes doivent représenter 1% aujourd’hui des musulmans dans notre pays, mais leur message, leurs messages sur les réseaux sociaux, il n’y a qu’eux finalement qu’on entend". Et de rajouter " Nous devons mener le combat à Ecole, dans la société, dans l’espace publique, avec la plus grande intransigeance. Et nous devons le faire en disant clairement quel est l’adversaire. L’adversaire est l’islamisme radical".
Cette position a été applaudi par la presse de droite et critiquée par celle de gauche. Elle a aussi été à l’origine de nombreuses réactions qui en disent long sur l’accélération opérée par Valls sur le sujet. Pour Anouar Kbibech president du CFCM : "on a plus besoin maintenant d’apaisement et de travail de fond, et pas tellement d’effets d’annonce et de prises de position un peu clivantes, qui pourraient être perçues comme stigmatisantes et donneraient du grain à moudre à ces groupuscules".
De son côté Abdallah Zekri, president de l’observatoire nationale contre l’Islamophobie s’est indigné : " Qu’on arrête de faire peur aux Français ! Est-ce que la campagne a déjà commencé ? (…) les autres extrémistes, l’extrême droite et les groupes identitaires vont se précipiter dans cette brèche".