C’est au lendemain de ce premier tour de des législatives qu’Emmanuel Macron a dû encore mieux mesurer le pari fou de la dissolution. Il voulait un centre fort et rassembleur. Il se retrouve avec des extrêmes imposants. Il avait une majorité certes relative, il se retrouvera avec un groupe parlementaire ne dépassant pas la centaine. La perte est immense. L’aventure de la dissolution tourne à la catastrophe nationale.
Car on y est presque. Il ne reste à l’extrême droite que peu pour s’emparer d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale et prendre Matignon pour diriger le gouvernement et gérer le pays. Ce qui était un cauchemar pour les uns est en train de devenir une douce réalité pour d’autres. Ce qui était un rêve pour les autres est en train de se transformer en un fait accompli et presque accepté par beaucoup.
Ce premier tour de ces législatives anticipées a connu une participation record. Les Français d’habitude si avares de leurs votes se sont rués sur les urnes. Le taux de participation indiquait déjà que le pays est sous le choc d’un changement brusque, d’une transformation inévitable. Les résultats de cette participation massive a profité à deux camps. Celui de l’extrême droite confortée dans sa lancée depuis le sacre des Européennes. Et celui de la gauche dans sa renaissance de ses cendres après une longue traversée du désert.
Aujourd’hui plus que jamais l’extrême droite est aux portes du pouvoir et la France au centre d’une attention internationale particulière. Devant cette hypothèse, l’idée d’un barrage républicain est en train de voir le jour. Avec ce cri de ralliement pour ce second tour de ces législatives : tout saut le RN dans les nombreuses triangulaires qui s’annoncent et dont les résultats vont, ou permettre une victoire de l’extrême droite, ou l’empêcher d’accéder au pouvoir.
Trois postures marquent la construction de ce front républicain. D’abord la harangue lancée par Emmanuel Macron toute de suite après l’annonce des résultats, confirmée par le premier ministre Gabriel Attal. Dans l’esprit de beaucoup, cette position présidentielle ressemble à la situation d’un pyromane qui allume le feu et appel à l’aide pour l’éteindre. Il n’est pas certain qu’il soit audible sur cette question brûlante du barrage républicain.
D’autant plus qu’il avait passé le plus clair de son temps lors de cette courte campagne à stigmatiser les extrêmes qu’il accusait de vouloir provoquer la guerre civile et la faillite économique de la France. Aujourd’hui il se livre à une contorsion difficile à avaler pour beaucoup, celle de préférer un candidat de l’extrême gauche qu’il a tant honni pour barrer le chemin à l’extrême droite, perçue tardivement comme une menace contre l’ordre et les institutions républicaines.
Il y a ensuite la position de la gauche. Sans ambiguïté. Ses chefs ont été d’une grande clarté. Il s’agit de tout faire pour empêcher la victoire des candidats du RN, même s’il faut voter pour le concurrent, qu’il soit de droite ou du camp présidentiel. Cette position de la gauche montre que l’heure est très grave et que la France se trouve devant un vrai danger et qu’il faut tout faire pour faire barrage à l’extrême droite au prix de voter pour des candidats perçus comme des adversaires politiques mais dont la victoire empêcherait la réalisation de cette majorité absolue Indispensable à Marine Le Pen et au jeune Jordan Bardella pour s’emparer des clefs du pouvoir législatif et exécutif.
La troisième posture est à trouver chez ceux à droite pour qui le Nouveau Front de Gauche est plus dangereux que le RN. Et que si demain ils ont à choisir entre leurs deux candidats, il n’hésiterait pas à choisir l’extrême droite. Pour cette catégorie, le barrage républicain ne doit en aucun cas profiter à l’extrême gauche. Et c’est sur eux que le RN parie pour gonfler ses troupes et espérer atteindre la majorité absolue des 289 sièges à l’Assemblée.
Si la victoire de l’extrême droite n’est pas encore acquise, le RN est déjà le grand gagnant de cette dissolution. Les alliés de la France en Europe, au Maghreb et dans le monde scrutent la situation et suivent de très près le probable chamboulement que la France s’apprête à vivre. Un tremblement de terre sur le plan européen. Une grande remise en cause dans ses rapports avec le Maghreb. Il a été constaté pendant la campagne une clarification du discours de l’extrême droite à l’égard de cette région.