Guéant, l’éminence grise en première ligne (Le Figaro)

L’ex-secrétaire général de l’Élysée, préfet de carrière, revient au ministère de l’Intérieur par la grande porte. Il succède à Brice Hortefeux, un autre fidèle de Nicolas Sarkozy.

À 66 ans, Claude Guéant devient «Monsieur le Ministre». Il y a encore une semaine, il ne se doutait pas qu’il quitterait si vite l’Élysée. À une demande d’interview qui lui avait été transmise il y a quelques jours, il avait répondu à un proche : «Je continue ma cure de silence.» Désormais, le très puissant secrétaire général de l’Élysée devenu ministre de l’Intérieur va retrouver le maelström médiatique qui lui plaît tant.

Son départ, qui avait déjà été envisagé en novembre dernier, lors du précédent remaniement, permet de donner un nouveau départ au ministère de l’Intérieur, avec une personnalité emblématique sur les sujets de sécurité. Malgré les services rendus par Brice Hortefeux, Nicolas Sarkozy constate que celui-ci a perdu du terrain dans l’opinion sur le sujet. Préfet, Claude Guéant a passé plus de l’essentiel de sa vie professionnelle au ministère de l’Intérieur, dès la fin des années 1970 avec le ministre de l’Intérieur Christian Bonnet, dont il était l’un des conseillers, jusqu’au poste d’immuable directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy devenu ministre de l’Intérieur, en passant par le cabinet de Charles Pasqua et de nombreuses affectations territoriales. Il a aussi été directeur général de la police nationale de 1994 à 1998. La liste des dossiers à hauts risques auxquels il a été confronté ressemble à l’énumération de la collection «Fleuve noir» : prise d’otages à Alger en 1994, attentats de Paris en 1995, affaire Kelkal, affaire AZF, traque d’Yvan Colonna. Mais aussi l’affaire «Human Bomb» en 1993, qui lui permet de découvrir ce jeune maire de Neuilly, Nicolas Sarkozy, qui va lui-même parlementer avec le preneur d’otages qui détient des enfants dans une école.

Depuis deux ans déjà, il dispose Place Beauvau de ses appartements de fonction. «On met le premier des préfets à la tête des flics», résume un proche. Le départ du secrétaire général arrange aussi le nouveau ministre Alain Juppé, qui s’est toujours montré réticent à l’égard de la diplomatie parallèle pratiquée par le numéro deux de l’Élysée. Enfin, de nombreux ennemis de l’homme de confiance du président œuvrent pour sa sortie depuis longtemps, du premier ministre François Fillon jusqu’aux fidèles, Patrick Buisson ou Alain Minc. Ils lui reprochent de s’être transformé en homme de pouvoir protéiforme, et vice-premier ministre.

«On revient à un fonctionnement normal de l’Élysée» , note un fidèle du chef de l’État : «En première partie de mandat, on nomme des secrétaires généraux tout-puissants qui finissent ministres, ensuite, on place un officier marinier», note ce dernier, en citant en exemple le destin gouvernemental de trois anciens secrétaires généraux : Dominique de Villepin, Pierre Bérégovoy et Jean François-Poncet.

Pour services rendus

Claude Guéant lui-même avait été déçu de ne pas être fait ministre il y a trois mois. Il avait aussi fait allusion à son âge. Nicolas Sarkozy offre donc à son «éminence grise» cette récompense pour services rendus. En 2006, dans son livre Témoignage, le premier hommage de Sarkozy était pour lui. Il saluait en lui «un technicien hors pair» et «une humanité dont j’ai pu mesurer, dans l’épreuve, qu’elle faisait de lui un ami indispensable». L’«ami» est donc revenu dans «la grande maison». En 2007, lors du pot de départ avec les directeurs des services du ministre de l’Intérieur, il s’était contenté d’un simple «au revoir» comme s’il savait à l’avance qu’il reviendrait par la grande porte.

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