Cette déclaration, qui avait provoqué une véritable bronca politique et syndicale, avec des cris d’orfraie et l’énervement manifeste de dirigeants politiques et syndicaux, de droite comme de gauche, peut-être extrapolée à bon nombre d’Etats de la zone euro, aujourd’hui en péril financier. Mais, rétrospectivement, ne s’agit-il pas là d’un aveu sincère, aujourd’hui validé par tous les politiques et les investisseurs internationaux, bref de la reconnaissance d’une situation qui, en fin de compte, ne serait pas très éloignée d’un scénario à la grecque ?
Certes, reconnaissons que les motivations peuvent être diversement interprétées : perception d’une réalité différente, sous l’éclairage de donnée économiques confidentielles dont disposent les gouvernants (insider) Ou volonté délibérée de provoquer un électrochoc dans la population, le monde politique, économique et syndical afin de faire avancer significativement des réformes jugées indispensables, nécessaires et incontournables ?
Dans tous les scenarii, cet aveu aurait aujourd’hui des conséquences immédiates et directes, déstabilisant gravement la place financière nationale, dissuadant les investisseurs internationaux de conserver leurs positions et leurs investissements, et provoquant une fuite massive des capitaux (« sell panic »). L’ensemble des marchés financiers en serait fortement perturbé, du fait d’un excès d’offre de tous les instruments financiers (actions, obligations, dérivés, swaps, spreads…). Avant le passage à l’euro, la devise nationale aurait naturellement lourdement pâti de cette tempête financière et les taux de change vis-à-vis des autres monnaies auraient été évidement réajustés à la baisse. Depuis l’introduction de l’euro, c’est la devise européenne qui subit le contrecoup de la défiance des marchés, comme nous le constatons aujourd’hui.
Le facteur clé est sans conteste la confiance. Pourquoi les investisseurs étrangers reviendraient-ils mettre leurs avoirs dans un pays en situation de faillite, alors qu’ils érigent en principe « dogmatique » l’aversion au risque ? Le premier cas de figure, aveu spontané et naïf est donc à oublier. Par contre, la volonté de provoquer un électrochoc dans l’opinion publique peut plaire, à condition qu’elle soit suivie d’effets et de mesures concrètes. Dans ce cas de figure, les investisseurs internationaux s’attacheront à analyser à la loupe la situation économique et la politique suivie pour y remédier. Il faudra en effet que les mesures d’assainissement des comptes publics soient clairement énumérées, jugées adaptées et crédibles, mises effectivement en œuvre et, surtout, génèrent les effets anticipés. Cette « feuille de route économique » s’inscrit naturellement dans la durée, à l’aune ou sous l’épée de Damoclès des marchés.
Car il convient aujourd’hui de concilier l’inconciliable. Ne plus effrayer les marchés par un laxisme budgétaire creusant les déficits et l’endettement public sans aucune marge de manœuvre, mais ne point tomber dans une stricte politique d’austérité qui contracterait la croissance et renverrait la reprise… aux calendes grecques.
Peu de solutions pour sortir de ce labyrinthe budgétaire. Le seul fil d’Ariane consiste dans la remise en ordre des finances publiques et la mise en œuvre d’actions correctrices pour juguler tous les déficits (budgétaire, sociaux, commercial, dette publique). En effet, il n’est aujourd’hui plus question, bien sûr, de laisser filer les déficits, ni même de les contenir, mais de mener de véritables et tangibles actions correctrices qui parviendront à les réduire drastiquement. L’Allemagne, les Pays-Bas ont été des pionniers (early trender) en la matière.
Les autres pays de la Zone euro feraient bien de s’en inspirer et de conduire à leur tour des actions concrètes afin d’abaisser significativement le niveau de leur dette nationale, plutôt que de se cantonner dans la formulation de vagues promesses liées à une sortie de crise…