Au total, six accusés – répartis dans trois dossiers – ont été jugés mardi, lors des premiers procès contre des "porteurs" de drapeaux amazighs (berbères) arrêtés dans la capitale, théâtre de manifestations inédites contre le régime qui se déroulent chaque semaine à travers l’Algérie depuis huit mois.
"Le procureur a requis deux ans ferme contre trois accusés" jugés dans le premier dossier, a expliqué Me Ikken, précisant que la Cour rendrait son verdict les concernant le 29 octobre.
Le parquet a également requis "la même peine de deux ans de prison ferme" contre les trois autres accusés, dont les procès ont pris fin tard dans la nuit, a annoncé le Comité national pour la libération des détenus "politiques et d’opinion" (CNLD).
Le tribunal a également fixé au 29 octobre l’annonce du verdict dans les procès de ces trois manifestants, selon cette source.
Lors du procès des trois premiers accusés, la défense a plaidé l’acquittement en expliquant que "l’article 79 du code pénal" sur l’atteinte à l’intégrité du territoire national "ne s’applique pas en l’espèce car brandir un drapeau amazigh, qui reflète l’identité berbère, ne menace en rien l’unité nationale".
– Multiplication d’arrestations –
Selon la Constitution, l’amazighité est avec l’Islam et l’arabité une des "composantes fondamentales de l’identité" algérienne.
Lors de précédents procès dans d’autres régions pour les mêmes faits, les accusés ont tous été acquittés de ce crime passible de dix ans de prison.
"Les six accusés jugés mardi figurent parmi les premiers manifestants arrêtés en juin à Alger pour avoir brandi un drapeau amazigh et sont depuis en détention préventive", a expliqué à l’AFP Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH).
Bilal Bacha, Hamza Meharzia, Khaled Oudihat, Tahar Safi et Messaoud Leftissi ont été arrêtés le 21 juin à Alger, selon le Comité national de libération des détenus (CNLD) qui recense une centaine de "détenus politiques et d’opinion" incarcérés en lien avec le "Hirak", le mouvement de contestation algérien.
Le pouvoir algérien, aux mains du haut commandement militaire depuis la démission en avril, sous pression de la rue, du président Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 20 ans, a multiplié ces derniers mois les arrestations de manifestants, militants ou journalistes.
Le drapeau culturel amazigh figurait, au côté des couleurs nationales, en bonne place dans les manifestations du "Hirak", avant que le général Ahmed Gaïd Salah, chef d’état-major de l’armée, n’interdise mi-juin sa présence dans les cortèges.
L’identité amazighe est un sujet sensible en Algérie, où un quart de la population est berbérophone. Les nombreuses revendications, notamment culturelles et linguistiques, liées à l’identité amazighe, ont été longtemps niées voire réprimées par l’Etat qui s’est construit autour de l’arabité.